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Coquillages : La préservation d’un patrimoine

Posté par othoharmonie le 28 avril 2017

 

Les travaux de Catherine Dupont retentissent également sur l’archéologie préventive, qui consiste à fouiller un site pour préserver la mémoire d’un patrimoine culturel et historique, avant qu’il ne soit détruit lors de son aménagement. Cette démarche est intéressante également pour un site potentiellement menacé de destruction de façon « naturelle » dans un contexte d’érosion : le phénomène est particulièrement sensible aujourd’hui compte tenu de la situation littorale de certains sites de fouille et leur sensibilité à la montée du niveau de la mer, au risque de disparition liée à la répétition des tempêtes, etc.. Tout ceci est donc à replacer également dans le contexte plus général du réchauffement climatique et des changements globaux en matière d’environnement.

Ces travaux de recherche montrent qu’un dépotoir coquillier préhistorique, voire historique, est un site archéologique à part entière qui mérite d’être analysé.

C’est en effet un combat du quotidien pour que les coquillages soient pris en compte dans les prescriptions archéologiques, mais aussi pour que les dépotoirs coquilliers qui sont régulièrement détruits par les tempêtes hivernales soient étudiés. Ainsi, une partie du temps de recherche de Catherine consiste à agir en urgence pour sauver des informations précieuses sur le quotidien des populations côtières du passé et leur environnement, ainsi que sur le devenir de ces animaux marins loin des océans. Cette activité est notamment menée en concertation avec l’organisme français dédié à cette mission, l’Inrap (Institut national de recherches archéologiques préventives).

coquillages

Les perspectives de recherche

Catherine Dupont poursuit aussi les problématiques abordées au cours de son doctorat : elle essaie d’évaluer l’impact de l’arrivée de l’élevage des animaux et de la culture de céréales sur l’exploitation des invertébrés marins, ressource sauvage.

La Bretagne est un formidable terrain de jeu pour approfondir cette problématique. Les plus anciens amas coquilliers de la façade atlantique française y sont conservés ; ils correspondent à la fin du Mésolithique. Ainsi, les décharges archéologiques fouillées actuellement sont les témoins du quotidien des derniers chasseurs-cueilleurs de notre littoral. Ces accumulations de coquilles sont particulièrement précieuses : elles ont permis la conservation de restes fauniques d’une diversité peu égalée à l’échelle de la façade atlantique européenne. Le protocole mis en place par le CReAAH permet, par la diversité des animaux et des végétaux étudiés, de mettre en lumière la diversité des environnements exploités par ces populations.

Les activités du quotidien de ces hommes, femmes et enfants sont également reconstituées. Avec d’innombrables questions sur leur mode de vie : ces populations qui vivaient de la chasse, de la collecte et de la cueillette ont-elles pu établir leur campement sur plusieurs saisons ? Sont-elles revenues régulièrement à la même saison sur la côte ? Dans quelles conditions climatiques ont-elles pu s’établir sur le bord de mer ? Est-ce la diversité des ressources naturelles qui les a amenés en des lieux précis du littoral ?

Ce sont les réponses à ces questions qui animent la chercheuse. Et ces coquilles qui lui sont si chères, pour peu qu’elle arrive à les « faire parler », conservent ces informations. Connaître les espèces exploitées, permet de savoir quels environnements l’ont été.

De plus, pour tenter de mettre en évidence les particularismes des populations mésolithiques, Catherine étudie activement plusieurs sites néolithiques de la façade atlantique de la France et de la Manche.

 

Une recherche internationale

Mais cette recherche n’a rien de « breizh-centrée » car Catherine travaille en réseau et entretient des échanges permanents avec les mésolithiciens de la façade atlantique de l’Europe, de la Norvège au sud du Portugal. Son but : obtenir le décodeur de certaines espèces de coquillages pour avancer sur la problématique du rythme d’occupation des sites archéologiques à amas coquilliers, à l’échelle de la façade atlantique de l’ensemble de l’Europe.

Pour cela elle participe à un réseau international de chercheurs en archéomalacologie dénommé ICAZ Shell Working Group (ICAZ : International Council for Archaeozoology) qui couvre tous les continents. Elle a aussi créé une base de données qui recense tous les composants archéologiques des amas coquilliers de la façade atlantique de l’Europe. Elle mouille également la chemise en participant aux fouilles d’amas coquillier mésolithiques du Portugal le long des anciens estuaires du Tage et du Sado près de Lisbonne.

Sa présence a permis d’y appliquer les mêmes protocoles que ceux qui ont été testés sur le territoire français. Ces nouvelles techniques apportent une nouvelle lecture des sites les plus célèbres du Mésolithique qui font parfois plus de 5 mètres de hauteur ! Si les coquilles forment la masse la plus visible, des milliers de fragments de crabes et de poissons y sont dorénavant étudiés. Ces données sont des jalons de plus pour comprendre la diversité des modes de vie des derniers chasseurs-cueilleurs-pêcheurs du littoral atlantique européen.

L’aspect international des recherches de Catherine Dupont est bien illustré par la toute récente parution d’un ouvrage de référence sur les mollusques archéologiques dans le monde entier, ouvrage dont elle est co-auteur : Archaeomalacology: Shells in the Archaeological Record.

 

On l’aura compris : le travail ne manque pas. Forte de la récompense nationale marquante que constitue la médaille de bronze du CNRS, Catherine Dupont va donc continuer de plus belle à développer l’étude de ces rebuts bien particuliers de nos ancêtres sur son terrain de prédilection : la plage !

FOCUS : Un nouveau fragment de coquille gravé à Beg-er-Vil

Au cours de la campagne de fouille 2014 de Beg-er-Vil, dans un refus de tamis, un nouveau fragment de coquille décoré a été découvert. En effet, dès les années 1980, l’archéologue Olivier Kayser de la DRAC avait identifié un bivalve présentant en son bord, sur la face interne de la coquille, un décor similaire à ce qui a été trouvé cette année à Quiberon.

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En quoi cet objet est scientifiquement important ? Le fait que la découverte se répète ne laisse plus de place au hasard : ces coquilles ont bel et bien été intentionnellement gravées et participent au quotidien de ces chasseurs-cueilleurs-pêcheurs de la côte atlantique. Si le fragment découvert cette année ne recolle pas avec l’élément identifié plus de trente ans auparavant, beaucoup de points communs les réunissent néanmoins :

  • ces fragments de coquilles sont calcinés et cassés ; ont-ils été brisés et brûlés intentionnellement au cours de rites qui nous restent encore inconnus ?
  • ils ont été découverts dans des fosses au sein de l’amas coquillier de Beg-er-Vil ;
  • leurs décors sont similaires : des croisillons localisés sur le bord de la coquille, au niveau de la face interne ; ce décor est original pour le Mésolithique de l’Ouest de la France.

Ainsi, l’amas coquillier de Beg-er-Vil pourrait bien être le lieu d’observation de scènes de vie quotidienne d’un groupe d’hommes et de femmes original.

Lire l’article en entier ICI / https://www.univ-rennes1.fr/actualites/une-archeologue-des-coquillages-medaillee-par-le-cnrs

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La petite noblesse du XVIIIe siècle aimait les crustacés

Posté par othoharmonie le 28 avril 2017

 

A cette période, Astacus astacus, dénommée « écrevisse noble » de l’Europe du Nord est considérée d’un goût supérieur à celui des autres espèces continentales, et en même temps, la pêche des écrevisses est devenue ainsi un business important pour l’exportation. Depuis le lac Hjälmaren dans le centre de la Suède, les queues d’écrevisses salées étaient par exemple envoyées en fûts dans les restaurants luxueux allemands, et dans les années 1870, un célèbre écrivain suédois de livres de cuisine, Dr Hagdahl, tremblait à l’idée que les écrevisses puissent disparaître en Suède suite à un trop gros effort de pêche. Il avait raison. Il est triste de constater comme ce bien culinaire a presque disparu, bien que cet évènement soit plutôt la conséquence de l’arrivée de la peste des écrevisses que de la pêche intensive. Il y a une centaine d’années, la Suède était le leader européen de l’exportation des écrevisses. De nos jours ce pays est de loin le plus grand importateur d’écrevisses, ce qui contribue en fait à menacer la survie des écrevisses dans les pays nouvellement contactés pour satisfaire ses besoins irrésistibles et uniques en terme de consommation des écrevisses.

noblesse

Légende de l’image : L’artiste et écrivain suédois Albert Engström était un visiteur fréquent de la maison de la famille des aristocrates Beck-Friis et ses visites coïncidaient très souvent avec la saison des fêtes des écrevisses. Il dessinait volontiers des vignettes dans le livre des visiteurs et il produisit une représentation très fine de la fête des écrevisses pour son hôtesse, la Baronne Beck-Friis.

Les livres de cuisine du XIXe siècle recommandaient les écrevisses dans la soupe de pois (!), les pâtés d’écrevisses et la sauce d’écrevisse avec un rôti de veau sans oublier les queues d’écrevisses servies avec des oeufs brouillés ou de la vinaigrette marinée.

Dans les jours anciens, quand les écrevisses étaient mangées au naturel, elles devaient être récemment cuites et très chaudes selon la règle. Dans un chant sur ce sujet, le poète de la fin du XVIIIe°siècle Carl Michael Bellman évoquait les gens « harponnant » les écrevisses rouges dans la poêle car elles étaient beaucoup trop chaudes pour les prendre à la main. Au cours du IXe siècle, les Suédois changèrent la température de leurs écrevisses et ainsi couplée avec la résidence d’été et le romantisme des archipels cela donna naissance aux fêtes des écrevisses typiques avec tout ce qui l’entoure comme en particulier une consommation excessive de schnaps. En Finlande et les pays baltes, on sert encore des écrevisses brûlantes.

Quand la pêche aux écrevisses devint un grand business (cinq millions pêchées chaque année dans le lac Hjälmaren!), il fut nécessaire de les protéger de l’extermination en particulier au moment de la mue et de la reproduction. Des lois ont été adoptées dans les comtés au cours du XIXe siècle, généralement interdisant la pêche d’avril à début août et finalement des lois nationales ont été introduites déclarant la période entre le 1er novembre et le 8 août période de fermeture, loi qui persista jusqu’à très récemment. Ainsi et pour une fois, les autorités ont contribué à fonder une occasion festive, la plus quintessencielle des institutions suédoises, la fête des écrevisses au début du mois d’août. Bien que les écrevisses, grâce aux produits surgelés, soient maintenant disponibles toute l’année, la plupart des gens pensent à les consommer au point culminant culinaire du mois d’août à la fin de l’été.

Traduction de l’article effectuée par C. SOUTY-GROSSET,

UMRCNRS6556, Université de Poitiers, France J.-Ö. SWAHN

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