Le porc n’a pas bonne réputation
Posté par othoharmonie le 30 avril 2016
Les moralistes stigmatisent sa gloutonnerie et sa saleté. Il sert même à railler des groupes ou des personnes : la représentation du Judensau est bien connue, associant un Juif et une truie ou un porc en inversant le rapport entre l’animal et le groupe : le porc devient un attribut stigmatisant le peuple juif de la part des Chrétiens, signe évident d’incompréhension.
Mais on retrouve ailleurs le porc comme instrument de dévalorisation : au XIVe siècle, une caricature injuriant un noble strasbourgeois est placardée sur la grande porte de la cathédrale : le noble, pendu par les pieds, met son sceau dans le derrière d’un porc. Mais il ne faut pas oublier non plus que le porc est aussi l’attribut de saint Antoine l’Ermite, ce qui le rend sympathique, autant que les tourtes qui contiennent sa chair et dont les bourgeois des villes font une grande consommation.
Les Chrétiens admettent la consommation du porc et de tous les animaux : le Christ affirme que l’impureté provient non de ce qui entre dans l’homme, mais de ce qui en sort, les paroles et les actes.
Le porc, animal impur
On sait que l’usage rituel juif interdit expressément la consommation de viande de porc. Cet interdit alimentaire figure dans la loi de Moïse : le Lévitique (11, 7) et le Deutéronome (14, 8). Mais on ne doit pas oublier que ces textes ne limitent l’interdit au seul porc, mais donnent une liste d’animaux impurs. Sont cités dans l’ordre suivant : le chameau, le daman, le lièvre, qui ruminent mais n’ont pas le sabot fendu, le porc, qui a le sabot fendu mais qui ne rumine pas, des oiseaux dont les rapaces et les charognards, la cigogne, la chauve-souris, les animaux aquatiques qui n’ont ni nageoires ni écailles.
Parmi ces animaux, le porc apparaît comme emblématique, au point que certains refusent même de le nommer et le désignent par une périphrase ou une expression vague. Au-delà de la consommation de sa chair, c’est tout l’animal qui est réputé impur : son cuir, ses sécrétions, ses organes.
La raison de cette interdiction a été recherchée par les historiens, les anthropologues, les théologiens, mais sans qu’on ait jamais pu donner une explication évidente.
On a allégué une raison hygiénique : la viande de porc se conserve mal et devient rapidement malsaine. Cependant, les Égyptiens, les Phéniciens ou les Éthiopiens en ont consommé sans que cela semble avoir posé de problème sanitaire majeur. On a aussi évoqué, dans le Talmud notamment, une raison morale : le porc se vautre dans la boue, mange de tout, dont des excréments et les immondices.
Certains géographes (dès l’époque antique) et anthropologues ont proposé de voir dans le porc un ancien animal totémique ; d’autres ont imaginé que le peuple juif rejette le porc car celui-ci avait été un animal sacré pour les Cananéens qui l’offraient en sacrifice à leurs dieux. On a aussi pensé que le porc est un animal spécifique à une société sédentaire, alors que les Hébreux sont nomades au désert et que le porc a besoin de beaucoup d’eau et de forêt, ce qui manque dans le désert.
Aucune de ces raisons ne trouve cependant de base religieuse. Michel Pastoureau ? qui les recense, renvoie plus volontiers à une raison culturelle. Le porc et les autres animaux frappés de l’interdit ont un point commun : aucun n’entre dans une catégorie définie. Ainsi, le porc a le sabot fendu, à l’instar des bovins, mais il ne rumine pas. Le corbeau, le vautour, les oiseaux de proie volent, mais mangent de la chair. La crevette, la langouste, l’anguille et d’autres espèces aquatiques appartiennent au monde maritime, mais n’ont ni écailles, ni arêtes comme les poissons. Ils sont « hors normes », ce qui explique leur mise en tabou.
En tout cas, ce qui est le plus important, c’est la force de la loi divine qui s’impose sans qu’on ait besoin d’exprimer une explication rationnelle.
L’Islam interdit également la consommation de la viande de porc.
SOURCE de l’article / Michel PASTOUREAU, Le cochon, histoire d’un cousin mal aimé, Gallimard, 2009,
Le cochon ou le porc a toujours eu mauvaise presse, et dans certaines religions, il est indiqué qu’il ne doit pas être consommé quelque soit sa forme. L’Islam par exemple, interdit formellement la consommation du porc, les juifs suivent le même précepte. Mais il vrai que l’on pourrait se demander pourquoi de telles directives.
En lisant votre question, je me suis rappelé cette parabole de Jésus, présente dans le Nouveau Testament. Je cite (*) : Vinrent à sa rencontre deux démoniaques, si dangereux que personnes ne pouvaient passer par ce chemin-là. Et ils se mirent à crier : « Que nous veux-tu Fils de Dieu ? Es-tu venu ici pour nous tourmenter avant le temps ? » Or à quelques distances il y avait un grand troupeau de porcs en train de paitre. Les démons suppliaient Jésus, disant « Si tu nous chasse envoie nous dans le troupeau de porcs ». Il leur dit « Allez ». Ils sortirent et s’en allèrent dans les porcs, et tout le troupeau se précipita du haut de l’escarpement, dans la mer, et ils périrent dans les eaux.
Cette parabole m’a immédiatement rappelé un ancien ouvrage sur le diable et les possessions démoniaques. Un passage indiquait alors que le diable, après avoir malmené un possédé dont il avait usé le corps, n’en trouvait pas de nouveau pour continuer d’exercer ses maléfices. Il décida alors de rentrer dans un porc, dont la grosseur et la graisse, lui permettait d’être à l’abri et dans l’opulence avant de retrouver un nouveau corps humain
Le cochon a depuis toujours trainé cette image, d’être un lieu où Satan avait pour habitude de prendre place, ou de s’y réfugier à défaut de pouvoir se rendre ailleurs. Ceci a certainement joué un rôle dans le fait d’interdire la consommation du porc, qui se rapporterait à consommer un animal habité par le diable, entrainant certainement mauvaises augures, maladies et beaucoup d’autres malheurs.
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