RITUEL DU COLIBRI

Posté par othoharmonie le 16 février 2016

 

 

Cet article, fondé sur l’étude du rituel de bienvenue, traite de la notion d’accueil et d’hospitalité chez les Wayana de la région des Guyanes. L’analyse met en évidence l’importance sémantique du « goûter du voyageur » et suggère l’existence d’une forme de partenariat hôte- visiteur orientée vers la réitération du savoir et la célébration en commun de l’être wayana. À cet égard, la figure du colibri,  image métaphorique du danseur et symbole du principe de fécondation, joue un rôle capital. Au plan étymologique, l’oiseau paraît d’ailleurs à l’origine du terme qui désigne la maison des festivités dans la plupart des langues karib de la région.

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LE DOMAINE DES COLIBRIS :

ACCUEIL ET HOSPITALITÉ CHEZ LES WAYANA

(RÉGION DES GUYANES)

Daniel SCHOEPF *

Mots clés : Région des Guyanes, Wayana, ethnologie, rites de passage, hospitalité, repas, maison des festivités, colibri, symbolisme animal. 

La vertu première de l’accueil wayana est qu’il se présente toujours égal à lui-même. Avec lui, pas d’hésitation, pas de crainte de commettre d’impair. Il suffit de l’avoir expérimenté une seule fois pour gagner l’assurance de le maîtriser. Pour peu qu’on y ait droit, le cérémonial se répète avec tant de constance qu’on pourrait s’y engager les yeux fermés. Les pas commandent les pas, les gestes reprennent les gestes, toute la séquence est obligée. C’est un scénario qui s’interprète invariablement de la même manière. 

La vertu du cérémonial wayana est qu’il se présente toujours pareil à lui-même, mais, dans le long terme, la permanence du traitement est aussi ce qui interpelle ou contrarie. Comment, après   plusieurs séjours et une franche convivialité, le visiteur pourrait-il ne pas s’étonner de ce que la prestation qui lui échoit soit identique à celle dont on le gratifia à la première rencontre ? 

Et de fait, comme me le rappelle une note écrite à mon arrivée au village d’Anapouaka en juillet 1978, soit après divers séjours chez les Wayana du Rio Paru au Brésil \ je n’étais pas sans savoir que le cérémonial de bienvenue serait toujours le même et donc qu’il n’y aurait personne au port pour nous accueillir, pourtant lorsqu’arriva le moment de mettre pied à terre et de reconnaître l’évidence de cette réalité, ce ne fut encore, l’espace d’un instant, qu’incrédulité et contrariété :

 

« Le dernier coup de pagaie a été donné ; la pirogue s’est immobilisée sur le banc de roche du port ; nous voici donc arrivés. Et l’évidence est là : encore une fois, il n’y a personne ! Personne non plus qui vienne à notre rencontre ! Personne, pas un enfant, pas même un chien … Oui, précisément, pas  même un de ces nombreux chiens de garde qui en toute autre circonstance rôderaient alentour du village. C’est assez dire que les villageois auront vu au loin notre embarcation approcher. Peut-être même nous auront-ils reconnus, nous, Waranalé, Anakari, sa femme et moi-même. C’est dire qu’ils auront appelé leurs chiens et qu’en les rudoyant pour se faire obéir ils les auront attachés dans leurs niches respectives ». 

« Plus de doute, le rituel se déroulera une fois encore comme il l’a toujours été. Et cette certitude m’en rappelle une autre : il se passera donc près d’une heure avant que nous gravissions la rampe qui donne accès au village, une heure et quart avant que nous soit servi le tulakanim emtapikatop, le « goûter du voyageur », une heure et demie avant que le chef ne prononce son discours d’accueil. Et pendant tout ce temps, les gestes seront codifiés, marqués au sceau de la tradition ethnique. Il n’y aura aucune place pour les sentiments personnels ou pour les expressions individualisées. Rien par exemple qui pourrait distinguer l’affection d’une mère qui reverrait son fils après plusieurs mois de séparation, de l’indifférence ou de la simple curiosité de deux personnes qui se rencontreraient pour la première fois ».

 

LIRE LE DOSSIER sur les PEUPLES ICI  http://www.persee.fr/web/revues/home/prescript/article/jsa_0037-9174_1998_num_84_1_1771

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