Ces coccinelles asiatiques qui envahissent l’Europe
Posté par othoharmonie le 27 octobre 2013
Face aux espèces indigènes, la vorace Harmonia axyridis ne cesse de gagner du terrain.
Et si la bête à bon Dieu devenait une bête du diable. Le développement de la population de coccinelles asiatiques en Europepourrait bientôt ternir l’image d’un animal jusqu’ici exempt de tout reproche. Depuis le début des années 2000, des pullulations de cette espèce, répondant au nom scientifique d’Harmonia axyridis, ont été observées d’abord en Allemagne et en Belgique, et depuis 2003 dans le nord de la France. Elles n’ont cessé de gagner du terrain et, aujourd’hui, une vingtaine de pays d’Europe occidentale et centrale en hébergent. « Et il est difficile de dire où cela va s’arrêter », explique Arnaud Estoup, directeur de recherche à l’Inra de Montpellier, qui étudie l’origine des invasions de coccinelles asiatiques.
Mais quel problème y aurait-il à l’expansion de cet insecte ? De grande taille (plus de six millimètres) et de couleur variable (jaune, orangée ou rouge, portant une vingtaine de points noirs et une tache noire en forme de M sur le thorax, ou bien encore noire avec de deux à quatre points rouges et un grand trapèze noir sur le thorax), Harmonia axyridis a quelques particularités plutôt gênantes.
Cannibale
La première est sa tendance au cannibalisme. Espèce tardive qui apparaît dans le courant du mois de juillet, la coccinelle asiatique connaît régulièrement des périodes de disette à l’automne. Particulièrement vorace, elle s’attaque alors aux coccinelles indigènes, dévorant leurs oeufs et parfois même leurs larves. Marc Kenis, entomologiste chercheur pour l’organisation internationale CABI, connaît bien le phénomène. « Certaines espèces qui partagent la même niche écologique que Harmonia axyridis (même régime alimentaire, même habitat) sont clairement menacées. Ainsi la coccinelle à deux points (Adalia bipunctata), qui était courante dans nos pays, est-elle devenue une espèce rare », affirme ce spécialiste suisse des espèces envahissantes. Se nourrissant des mêmes pucerons et vivant comme Harmonia axyridis dans les feuillus, Adalia bipunctata est en passe de perdre la compétition. « Et les conséquences globales au plan de l’écosystème demeurent encore difficiles à évaluer », souligne Marc Kenis.
Autre défaut de ces petites bêtes venues d’Asie, elles ont une fâcheuse tendance à vouloir hiverner en bande (parfois par centaines) dans nos maisons. Or, si elles ne présentent pas de danger (si ce n’est quelques rares cas d’allergie), elles peuvent occasionner des désagréments tels qu’une odeur nauséabonde ou encore des tâches sur les murs.
Menace sur les vignes
Enfin, au plan économique, elles pourraient à terme poser des problèmes aux viticulteurs. Car même si rien de tel n’a encore été signalé en France, aux États-Unis et au Canada, où elles sont présentes depuis plus longtemps, les coccinelles asiatiques envahissent les vignes. Elles ne mangent alors que peu de grains mais peuvent, en revanche, donner un goût très désagréable au vin si elles se glissent dans la récolte. « Une seule coccinelle par kilo de fruits peut suffire à gâter le précieux nectar », indique Marc Kenis. La faute aux toxines que l’animal dégage pour se protéger des prédateurs.
Une dernière question taraude encore l’esprit : comment ces coccinelles d’Asie sont-elles arrivées chez nous ? L’équipe de chercheurs de l’Inra que dirige Arnaud Estoup est, au moins partiellement, parvenue à répondre à cette question. L’espèce qui envahit l’Europe aujourd’hui serait le résultat d’un croisement entre des coccinelles asiatiques importées accidentellement du nord-est des États-Unis et d’autres individus introduits volontairement dans nos pays depuis une vingtaine d’années pour lutter contre les pucerons des rosiers. Moins coûteuses à élever et présentant un meilleur taux de fécondité, elles avaient alors été préférées aux espèces indigènes pour la lutte biologique. À l’époque, on ne connaissait encore de cette coccinelle que ses vertus…
Le Point.fr - Publié le 30/08/2011 à 20:23
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