Les Migrations des Cigognes
Posté par othoharmonie le 20 octobre 2013
La recherche systématique sur les migrations commence avec l’ornithologue allemand Johannes Thienemann, qui débute des études par baguage en 1906 à l’observatoire d’oiseaux « Vogelwarte Rossitten », sur l’isthme de Courlande dans ce qui est alors la Prusse-Orientale. Bien que peu de cigognes passent par cet observatoire, celui-ci coordonne le baguage à grande échelle de l’espèce dans toute l’Allemagne et ailleurs en Europe. Entre 1906 et la Seconde Guerre mondiale près de 100 000 Cigognes blanches sont baguées, principalement des juvéniles, et plus de 2 000 « reprises » longue-distance (c’est-à-dire d’oiseaux capturés à nouveau, loin de leur lieu de baguage) d’oiseaux portant des bagues de Rossitten sont effectuées entre 1908 et 1954. Des techniques plus modernes sont aujourd’hui utilisées de manière complémentaire, comme les balises Argos. Tel est le cas de Max la cigogne, suivi par le musée d’histoire naturelle de Fribourg depuis sa naissance en 1999 et encore vivant en 2012, qui détient ainsi le record de longévité pour un animal muni d’une balise.
Les Cigognes blanches quittent leur aire de reproduction d’été en août et septembre en Europe, s’envolant vers le sud pour rejoindre l’Afrique. Plutôt solitaires lors de la nidification, elles se montrent particulièrement grégaires pour la migration. Elles passent l’hiver dans la savane du Kenya et d’Ouganda, au Sud jusque dans la province du Cap, en Afrique du Sud.
Dans ces quartiers d’hiver, ils se rassemblent en grands groupes qui peuvent dépasser le millier d’individus. Certains oiseaux partent vers l’Ouest, dans l’Ouest du Soudan et du Tchad, et peuvent rejoindre le Nigeria. Au printemps, les oiseaux reviennent vers le nord et passent par le Soudan et l’Égypte de février à avril. Ils sont de retour en Europe vers fin mars et avril, après un trajet moyen de 49 jours, alors que le périple d’automne est accompli en 26 jours environ. Le vent arrière ou la rareté de la nourriture et de l’eau augmentent la vitesse moyenne du vol.
Pour éviter la longue traversée de la Méditerranée, les oiseaux d’Europe centrale empruntent deux tracés différents. L’un contourne la mer par l’Est, passant par le Bosphore en Turquie, traversant le Levant, puis en contournant le désert du Sahara en descendant vers le sud par la vallée du Nil ; il est emprunté par 340 000 oiseaux, formant des rassemblements spectaculaires. Le second itinéraire passe par l’Ouest de la Méditerranée, et s’effectue via le détroit de Gibraltar ; 35 000 Cigognes blanches l’empruntent. Ces couloirs de migration maximisent l’utilisation des courants ascendants et permettent donc aux cigognes d’économiser leur énergie. La route de l’Est est de loin la plus utilisée, avec 530 000 Cigognes blanches y passant chaque année, ce qui en fait dans cette zone le second migrant le plus fréquent après la Bondrée apivore (Pernis apivorus). Les colonies de rapaces, de Cigognes blanches et de Pélicans blancs peuvent s’étendre sur 200 km de long. Le trajet par l’Est est en distance deux fois plus long que par l’Ouest, mais les oiseaux prennent le même temps pour atteindre les aires d’hivernage quel que soit leur itinéraire.
Les Cigognes blanches juvéniles effectuent leur première migration vers le sud selon le même trajet que leurs parents, mais déplacés de ce trajet par les conditions météorologiques, ils sont désorientés et peuvent rejoindre de nouvelles zones d’hivernage. Les adultes, familiers des endroits qu’ils traversent, peuvent compenser les vents forts et ajuster leur direction pour retrouver leurs quartiers d’hiver usuels. Ainsi tous les oiseaux ayant migré au printemps, même ceux ayant hiverné dans des endroits inhabituels, peuvent trouver leur chemin pour retourner vers les sites de reproduction traditionnels. Cependant les jeunes de moins d’un an restent généralement sur les zones d’hivernage et attendent la migration suivante. Une expérience avec de jeunes oiseaux élevés en captivité à Kaliningrad et relâchés en l’absence de cigognes sauvages pouvant leur servir d’exemple a révélé qu’ils semblaient avoir un instinct de voler vers le sud, même si la dispersion dans la direction était importante.
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