Répartition et migration de la Cigogne
Posté par othoharmonie le 15 octobre 2013
La sous-espèce type a une aire de répartition disjointe mais très étendue à travers l’Europe ; les populations sont plus denses dans la péninsule Ibérique et en Afrique du Nord à l’Ouest, ainsi qu’en Europe centrale et de l’Est — avec le quart de la population mondiale se concentrant en Pologne — et dans l’Ouest de l’Asie. La population de la sous-espèce C. c. asiatica compte près de 1 450 oiseaux et se limite à une région d’Asie centrale située entre la mer d’Aral et le Xinjiang, dans l’ouest de la Chine. On pense que la population du Xinjiang a disparu vers 1980. Les itinéraires de migration étendent l’aire de répartition de cette espèce dans de nombreuses parties d’Afrique et d’Inde. Certaines populations sont situées sur la route de migration de l’Est, qui passe à travers Israël en direction de l’Afrique orientale et centrale.
Quelques cas de reproduction ont été signalés en Afrique du Sud depuis 1933 à Calitzdorp, et environ 10 oiseaux ont été vus nicher depuis les années 1990 autour de Bredasdorp. Une petite population de cigognes blanches hiverne en Inde et appartient principalement à la sous-espèce C. c. asiatica, puisque des volées comptant jusqu’à 200 oiseaux ont été observées dans les années 1900 migrer au printemps à travers la vallée de Kurram. Cependant des oiseaux bagués en Allemagne ont été recapturés dans l’Ouest et dans le Sud de l’Inde, respectivement à Bîkâner et Tirunelveli. Un spécimen atypique avec un cercle oculaire rouge, une caractéristique de la Cigogne orientale (C. boyciana), a également été rapporté et une étude plus approfondie de la population indienne est nécessaire. Au nord de son aire de reproduction, la Cigogne blanche est un migrateur de passage ou erratique en Finlande, en Grande-Bretagne, en Irlande, en Islande, en Norvège et en Suède, ainsi qu’à l’Ouest des Açores et de Madère. La répartition de l’espèce s’étend vers l’Ouest de la Russie.
Habitat
La Cigogne blanche privilégie les prairies herbeuses pour trouver son alimentation, les terres cultivées, souvent aux abords des cours d’eau, ainsi que les marais et les zones inondables ; 75 % des nids sont situés dans ces zones humides. Elle évite les zones envahies par les herbes hautes et les arbustes. Dans la région de Tchernobyl, dans le Nord de l’Ukraine, les populations ont diminué après l’accident nucléaire de 1986, quand les terres agricoles ont laissé la place aux broussailles et aux herbes hautes. Dans certaines parties de la Pologne, les sols naturellement pauvres en ressources alimentaires ont contraint les Cigognes blanches à chercher leur nourriture dans les décharges depuis 1999. Des oiseaux ont également été signalés prospecter dans les décharges au Moyen-Orient, en Afrique du Nord et en Afrique du Sud. Dans ses zones d’hivernage, elle peuple les savanes et les steppes, évitant les forêts tropicales.
La Cigogne blanche niche en grand nombre dans les régions aux prairies ouvertes, en particulier aux zones herbeuses humides ou périodiquement inondées, et moins dans les zones plus végétalisées, buissonneuses ou forestières. On a retrouvé cet oiseau nichant jusqu’à 2 000 m d’altitude en Arménie. En Afrique, sur les aires d’hivernage, on la retrouve dans les prairies, les zones humides, et les terres agricoles. La Cigogne blanche a probablement bénéficié des activités humaines durant le Moyen Âge, les zones boisées ayant été défrichées pour la création de nouveaux pâturages et de terres agricoles, et l’espèce se trouvait alors dans une grande partie de l’Europe, nichant jusque dans le nord que la Suède. Un couple a niché au sommet de la cathédrale Saint-Gilles d’Édimbourg, en Écosse, en 1416.
Au xixe siècle l’industrialisation et les changements dans les méthodes agricoles causent un déclin de l’espèce, et la Cigogne blanche ne niche plus dans de nombreux pays depuis, les bastions de la population de l’Ouest étant dorénavant en Espagne, en Ukraine et en Pologne. Dans la péninsule ibérique, les populations sont concentrées dans le Sud-Ouest, et ont également diminué en raison des pratiques agricoles. Une étude publiée en 2005 a révélé que la région de Podhale dans les hautes terres du Sud de la Pologne avait connu un afflux de Cigognes blanches, les premières ayant nidifié en 1931, à des altitudes de plus en plus élevées au fil des années, pour atteindre 890 mètres d’altitude en 1999. Cela pourrait être lié au réchauffement climatique, menant également d’autres animaux et des plantes à des altitudes plus élevées. En 2003, une autre étude rapportait que, au cours des vingt années passées, les Cigognes blanches nichant dans la province de Poznań, dans l’ouest de la Pologne, arrivaient au printemps environ dix jours plus tôt qu’à la fin du xixe siècle.
Migrations
La recherche systématique sur les migrations commence avec l’ornithologue allemand Johannes Thienemann, qui débute des études par baguage en 1906 à l’observatoire d’oiseaux « Vogelwarte Rossitten », sur l’isthme de Courlande dans ce qui est alors la Prusse-Orientale. Bien que peu de cigognes passent par cet observatoire, celui-ci coordonne le baguage à grande échelle de l’espèce dans toute l’Allemagne et ailleurs en Europe. Entre 1906 et la Seconde Guerre mondiale près de 100 000 Cigognes blanches sont baguées, principalement des juvéniles, et plus de 2 000 « reprises » longue-distance (c’est-à-dire d’oiseaux capturés à nouveau, loin de leur lieu de baguage) d’oiseaux portant des bagues de Rossitten sont effectuées entre 1908 et 1954. Des techniques plus modernes sont aujourd’hui utilisées de manière complémentaire, comme les balises Argos. Tel est le cas de Max la cigogne, suivi par le musée d’histoire naturelle de Fribourg depuis sa naissance en 1999 et mort en décembre 2012 en détenant le record de longévité pour un animal muni d’une balise.
Itinéraires
Les Cigognes blanches quittent leur aire de reproduction d’été en août et septembre en Europe, s’envolant vers le sud pour rejoindre l’Afrique. Plutôt solitaires lors de la nidification, elles se montrent particulièrement grégaires pour la migration. Elle passent l’hiver dans la savane du Kenya et d’Ouganda, au sud jusque dans la province du Cap, en Afrique du Sud. Dans ces quartiers d’hiver, elles se rassemblent en grands groupes qui peuvent dépasser le millier d’individus. Certains oiseaux partent vers l’ouest, dans l’Ouest du Soudan et du Tchad, et peuvent rejoindre le Nigeria. Au printemps, les oiseaux reviennent vers le nord et passent par le Soudan et l’Égypte de février à avril. Ils sont de retour en Europe vers fin mars et avril, après un trajet moyen de 49 jours, alors que le périple d’automne est accompli en 26 jours environ. Le vent arrière ou la rareté de la nourriture et de l’eau augmentent la vitesse moyenne du vol.
Pour éviter la longue traversée de la Méditerranée, les oiseaux d’Europe centrale empruntent deux tracés différents. L’un contourne la mer par l’Est, passant par le Bosphore en Turquie, traversant le Levant, puis en contournant le désert du Sahara en descendant vers le sud par la vallée du Nil ; il est emprunté par 340 000 oiseaux, formant des rassemblements spectaculaires. Le second itinéraire passe par l’Ouest de la Méditerranée, et s’effectue via le détroit de Gibraltar ; 35 000 Cigognes blanches l’empruntent3. Ces couloirs de migration maximisent l’utilisation des courants ascendants et permettent donc aux cigognes d’économiser leur énergie. La route de l’Est est de loin la plus utilisée, avec 530 000 Cigognes blanches y passant chaque année, ce qui en fait dans cette zone le second migrant le plus fréquent après la Bondrée apivore (Pernis apivorus). Les colonies de rapaces, de Cigognes blanches et de Pélicans blancs peuvent s’étendre sur 200 km de long. Le trajet par l’Est est en distance deux fois plus long que par l’Ouest, mais les oiseaux prennent le même temps pour atteindre les aires d’hivernage, quel que soit leur itinéraire.
Les Cigognes blanches juvéniles effectuent leur première migration vers le sud selon le même trajet que leurs parents, mais déplacés de ce trajet par les conditions météorologiques, ils sont désorientés et peuvent rejoindre de nouvelles zones d’hivernage. Les adultes, familiers des endroits qu’ils traversent, peuvent compenser les vents forts et ajuster leur direction pour retrouver leurs quartiers d’hiver usuels. Ainsi tous les oiseaux ayant migré au printemps, même ceux ayant hiverné dans des endroits inhabituels, peuvent trouver leur chemin pour retourner vers les sites de reproduction traditionnels. Cependant les jeunes de moins d’un an restent généralement sur les zones d’hivernage et attendent la migration suivante. Une expérience avec de jeunes oiseaux élevés en captivité à Kaliningrad et relâchés en l’absence de cigognes sauvages pouvant leur servir d’exemple a révélé qu’ils semblaient avoir un instinct de voler vers le sud, même si la dispersion dans la direction était importante.
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