Les «nourrisseurs» de volatiles
Posté par othoharmonie le 1 octobre 2013
Les «nourrisseurs» de volatiles étaient la semaine dernière au centre d’un colloque auquel participaient des chercheurs.
Le volatile a ses détracteurs, très nombreux. À l’image de ceux qui, par exemple, se sont amusés à constituer un «groupement d’éradication des pigeons parisiens» sur Facebook. L’oiseau a aussi ses ardents supporteurs, prompts à dénoncer les «rafles» et la «précarité» dont il est victime. Véritable passion urbaine, le pigeon était la semaine dernière au centre d’un colloque organisé à l’initiative de Natureparif (agence régionale pour la nature et la biodiversité en Ile-de-France) et du groupe de recherche interdisciplinaire «le pigeon en ville», dirigé par Anne-Caroline Prévot-Julliard, chercheuse au CNRS et au Muséum national d’histoire naturelle.
Cette première rencontre s’est notamment penchée sur le cas des «nourrisseurs». Ces personnes qui prennent soin des volatiles et agacent la plupart des parisiens. Qui le leur rendent bien. «Elles font bien souvent l’objet d’insultes, voire même parfois d’agressions physiques», relève Véronique Servais, professeur d’anthropologie. Accusés de générer des concentrations, les pros-pigeons «sont considérés comme des déviants, car ils s’écartent des normes sociales», décrypte la chercheuse.
Un «sacerdoce » coûteux
Pas étonnant, à vrai dire, puisque nourrir les pigeons est une activité interdite par l’article 120 du règlement sanitaire départemental et passible d’une amende de 450€. «Avec cette loi, s’énerve Brigitte Marquet, fondatrice du site l’Ambassade des pigeons, les pouvoirs publics ont créé une véritable guerre civile entre les citadins. À Paris comme ailleurs, beaucoup d’anti n’hésitent pas à dénoncer les défenseurs des oiseaux à la police. Le nourrissage devrait être géré par la mairie, ça calmerait le jeu. Au lieu de cela, tout est fait pour encourager la détestation.»
«Ils croient bien faire, mais les nourrisseurs favorisent la concentration et la surpopulation des pigeons, estimés à 80.000, soit un pour 25 habitants, ce qui occasionne des dégâts sur les biens publics et privés à cause de l’accumulation de fientes», plaide de son côté la mairie de Paris.
Conséquence: «Les nourrisseurs souffrent d’un discrédit, note Véronique Servais. Ils ont le sentiment d’être traqués. Du coup, ils se font plus discrets, sortent de préférence la nuit, dans des lieux retirés et opèrent plus rapidement. Mais, pour autant, ils ne vont pas s’arrêter.» Car s’ils ont le sentiment d’avoir établi une véritable communication avec le volatile, ils se sentent plus encore investis d’une responsabilité.
«Le plus souvent, ils deviennent nourrisseurs par hasard, en jetant quelques miettes et puis au fur et à mesure, ils se rendent
compte du piteux état des pigeons et les voilà pris dans un engrenage: ils ne peuvent plus se désengager.» Beaucoup parlent ainsi d’un «sacerdoce», coûteux en temps et en argent. Impossible pour certains par exemple de partir en vacances. «Moi je les nourris avec mauvaise conscience, je me fais souvent insulter par des dames âgées et si je dois m’absenter, je délègue toujours ma fonction», témoigne anonymement une élégante sexagénaire.
Même s’il n’existe pas de profil type du nourrisseur, «on rencontre une majorité de personnes de plus de 60 ans et de femmes, mais aussi des hommes, des actifs comme des retraités ou des chômeurs», assure Véronique Servais . Et contrairement aux idées reçues, peu sont en fait marginalisés et isolés. «Ce sont des gens parfaitement normaux, insiste Brigitte Marquet, qui voient davantage la grâce que la crotte.»
source le figaro.fr
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