Lait de chamelle
Posté par othoharmonie le 6 mai 2013
C’est enfin l’animal nourricier la chamelle dont la production laitière est la plus importante de tous les animaux domestiques et dont le lait est préféré à tous les autres : il donne la force, la santé et ne communique aucune maladie. Le lait de chamelle qui vient d’être trait est bu aussitôt. Léger, pétillant parce que les minces jets qui sortent des pis forment une mousse aérée, ce lait encore tiède est l’aliment préféré des vieillards et des malades. Son odeur et son goût s’affinaient suivant le pâturage dont s’est nourrie la chamelle : on retrouve le goût salé de I’Artiplex halinzus, aramas, ou l’odeur de choux de l’alouât (Schouwia purpurea). Malgré le plaisir que l’on éprouve à boire du lait tiède ou même chaud, il est recommandé d’en boire avec mesure car il est plus difficile à digérer » (Gast 1968 : 141). Si l’animal de selle est recherché par tous, certains groupes, spécialistes du commerce caravanier, possèdent des animaux de bât avec des mâles très nombreux: d’autres un élevage laitier autoconsommé où les femelles sont majoritaires.
Le lait en général, et celui de chamelle avant tout, constitue plus qu’un aliment : il est le symbole de la vie et des techniques très élaborées ont été mises au point pour permettre de préserver le plus possible la production du lait pour l’homme lorsqu’il devient concurrent de l’animal pour (ce précieux breuvage. Des techniques très élaborées ont été mises au point pour le sevrage et pour le maintien de la lactation des chamelles ; dont les petits sont morts à la naissance. Ces techniques ont été décrites (Beinus 1980 : 109- 11 4) et témoignent d’une connaissance très fine de la psychologie animale : par des mannequins de paille couverts du placenta ou de la peau du chamelon décédé, par la simulation d’une nouvelle naissance, par des scénarios d’attaques pour provoquer une réaction de défense d’un chamelon par la chamelle et provoquer l’adoption de ce chamelon de substitution. Le sevrage, comme 1′adoption du petit animal. vise, par toute une gamme d’artifices, à conserver du lait pour l’homme, au-delà des vicissitudes de la naissance et de la mort.
Si, dans la poésie lyrique, la femme aimée est souvent comparée à une génisse chez les Peuls, elle s’identifie chez les Touaregs à une chamelle : « Elle est plus belle qu’une chamelle blanche qui s’est reposée six mois. Est entraînée et grasse. a une belle bosse » (Foucauld 1925 : 1,527-528). L’image de la beauté féminine est toujours associée à des formes amples et les vers suivants reprennent le même thème : » Kouka est le mirage des vallons. »
Le parfum qu’elle exhale l’emporte sur ceux qu’apportent les caravanes ; elle est plus belle que la foule des pèlerins faisant le pèlerinage à La Mecque ; elle est plus belle que des chamelonnes blanches dont chacune tète le lait de 2 chamelles». (Foucauld 1930 : II; 73). Le terme final de la comparaison se rattache à un fait exceptionnel : des chamelonnes blanches – c’est la robe la plus appréciée – tétant chacune deux chamelles.
Quand on sait la rivalité qui existe entre l’homme et l’animal pour le lait – on abandonne au chamelon le reste di1 lait après la traite qu’il a amorcée – on peut mesurer combien est extraordinaire le fait de laisser la production du lait de deux laitières à un petit animal. Seuls de riches éleveurs peuvent se permettre de prélever sur la nourriture des hommes la production d’une chamelle dans le seul but du développement précoce de chamelons. Cela rappelle l’engraissement des femmes naguère pratiqué dans l’aristocratie : jeunes chamelles et jeunes femmes sont associées dans une même suralimentation à base de lait qui provoque l’amplitude des formes et un passage souvent prématuré de l’adolescence à l’âge adulte.
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