Les batraciens
Posté par othoharmonie le 12 décembre 2012
La région Champagne-Ardenne compte cinq espèces d’Urodèles (salamandre et tritons) et onze espèces d’Anoures (grenouilles et crapauds) soit seize espèces sur la trentaine rencontrée en France.
Deux espèces ont, semble t-il, disparu, le Pélobate brun et le Crapaud vert. Les dernières mentions du Crapaud vert datent de 1924 et les observations les plus récentes de Pélobate brun proviennent du département des Ardennes dans les années 1979-1980. En 1948, cette espèce étant encore considérée commune dans ce département mais a visiblement décliné suite à la dégradation de ses habitats.
Le Sonneur à ventre jaune atteint sa limite septentrionale de répartition dans notre région en Argonne ardennaise.
Le Triton alpestre, le Triton palmé et la Grenouille verte sont communes et possèdent une répartition assez large dans les quatre départements. La répartition et le statut de conservation de la Grenouille de Lesson sont inconnus pour le moment. En effet, les grenouilles de Lesson et verte ne peuvent difficilement être différenciées avec certitude sur le terrain (des études génétiques seraient d’une grande aide). La Grenouille rieuse est une espèce localisée issue de populations échappées de captivité. Il s’agit donc d’une espèce exogène dont la présence n’est pour le moment qu’anecdotique. Aussi, ces cinq espèces ne seront pas considérées comme présentant un enjeu de conservation dans la région.
Répartition
Toutes les espèces de batraciens de la région Champagne-Ardenne occupent les quatre départements. Le Sonneur à ventre jaune que l’on rencontre encore assez facilement dans de nombreux secteurs, symbolise notre région dans ses parties les plus forestières.
Les régions naturelles riches en forêts humides (Argonne, Champagne humide, Bassigny, Montagne de Reims, forêts ardennaises…) avec des étangs, des mares, des ruisseaux, des sources sont les habitats principaux d’une dizaine d’espèces de nos batraciens (Salamandre tachetée, Tritons alpestre, ponctué, palmé et crêté, Grenouilles rousse, agile et verte, Crapaud commun, Sonneur à ventre jaune). Orientations Régionales de Gestion de la Faune sauvage et de l’amélioration de la qualité de ses Habitats
La Champagne crayeuse est la zone la plus pauvre avec un nombre de sites favorables très faibles, même si de petites vallées (et les vestiges de marais) traversant la grande plaine réservent encore bien des surprises. Les drainages importants réalisés depuis un siècle, l’irrigation qui entraîne un rabattement de nappe et assèche des zones humides, les remblaiements qui ne laissent guère de mares, fossés ou étangs ont largement affecté les populations de batraciens. Toutefois, l’activité des camps militaires a permis de conserver les anciens savarts qui sont devenus de véritables sanctuaires pour des espèces comme le Crapaud calamite et le Pélodyte ponctué.
Les régions calcaires (Langres, Barséquanais…) sont des secteurs plus secs moins favorables aux batraciens (hormis l’Alyte accoucheur qui recherche ce type de milieux).
Les régions d’élevage (Bassigny, Chaourçois, Apance-Amance…) ayant conservé leurs pâtures et leurs nombreuses mares abreuvoirs sont très appréciées par des espèces comme la Grenouille agile ou le Triton crêté.
Les anciennes carrières, sablières et les mares temporaires sont d’une grande importance pour plusieurs espèces de batraciens (Pélodyte ponctué, Alyte accoucheur et Crapaud calamite). Les gravières en exploitation sont devenues les sites de reproduction principaux pour le Crapaud calamite qui recherche des zones régulièrement décapées et dépourvues de végétation comme pouvaient l’être, jadis, les bancs de graviers et de sable creusés de dépressions inondées, laissés par les crues lorsque les fleuves et rivières avaient encore un fonctionnement naturel.
La protection
Il est difficile d’évaluer la vulnérabilité de certains batraciens de notre région, compte-tenu de la discrétion de certaines espèces et du faible nombre de spécialistes. Ainsi, certaines régions naturelles sont sous prospectées. C’est le cas d’une grande partie de la Haute-Marne et d’une partie de la Marne et de l’Aube. De plus, certaines informations détenues par les nombreuses structures concernées par la problématique batraciens ne sont pas centralisées.
Malgré l’édition d’un l’atlas des reptiles et amphibiens paru en 1995 très peu de mesures de gestion et de protection furent mises en place. Plusieurs sites abritant des espèces en danger ont disparu depuis.
Aujourd’hui, nous constatons que la majorité des espèces de batraciens sont en net déclin. La dégradation des zones humides, la disparition des mares, les pollutions, les infrastructures routières et les insecticides sont autant de menaces qui contribuent à l’érosion des populations. Certaines espèces, assez rares il y a dix ans, sont maintenant dans une situation critique comme la Rainette arboricole ou le Pélodyte ponctué. D’autres, comme l’Alyte accoucheur, le Crapaud calamite ou le Triton crêté voient leurs habitats se réduire et se dégrader très rapidement.
La survie de la majorité des espèces passe par la protection de sites de reproduction (mares abreuvoirs, anciennes carrières et gravières, queues d’étangs, ornières…) mais aussi par une réflexion plus globale sur l’écologie des différentes espèces : leurs milieux de chasse et leurs déplacements. Il est par exemple peu utile de protéger un ensemble de mares si l’on ne peut proposer aux batraciens un territoire de chasse et d’hibernation satisfaisant aux alentours.
Dans le cadre des déplacements migratoires des batraciens, il faut également tenir compte des
problématiques liées aux axes routiers très fréquentés. Ces derniers, en plus d’engendrer une forte mortalité de batraciens en période de migration, favorisent la fragmentation des populations et empêchent les échanges génétiques nécessaires à leur survie. Cela passe par une réflexion en amont de la création des axes routiers.
En forêt, des actions doivent être menées avec les gestionnaires et organisations professionnelles afin d’adapter certaines méthodes de gestion favorables à la batrachofaune.
Les anciennes carrières, sablières et les mares temporaires sont avec les camps militaires, les derniers refuges pour le Pélodyte ponctué, espèce rare et très menacée dans la région. Leur protection est donc devenue prioritaire et urgente. Cette protection jouera aussi en faveur d’espèces comme le Crapaud calamite, l’Alyte accoucheur ou encore les crustacés d’eau douce.
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