Lion 9
Posté par othoharmonie le 4 décembre 2011
Par H. Demesse
Certains naturalistes nous énoncent plusieurs de ces récits fabuleux qui se sont accrédités un peu partout à propos du Lion. Cet animal, dit-on, serait toujours dominé par la fièvre ; il dort les yeux ouverts ; telle ou telle partie de son corps a des vertus merveilleuses en médecine ; ses os sont tellement durs qu’ils donnent des étincelles au choc, etc.
Les Arabes, dont la nature est essentiellement incline à la superstition la plus exagérée, n’ont pas peu contribué à répandre ces croyances. Ils prétendent que, vers le milieu du jour, le Lion souffre horriblement de la fièvre froide, ce qui le rend paresseux ; ils allèguent encore que, si on veut le mettre en mouvement, il faut l’exciter à coups de pierre, car il ne se déplace pas de lui-même. En réalité, il n’en est pas tout à fait ainsi, quoiqu’on ne puisse nier qu’il soit très paresseux tant que le soleil est au-dessus de l’horizon. Dans mon dernier voyage en Abyssinie, dit Brehm, j’ai pu m’assurer qu’il se glisse quelquefois, pendant le jour, dans le fourré ou se tient tranquillement sur un point culminant pour observer les animaux du canton qu’il habite. Ainsi, l’un de mes domestiques a vu un Lion assis en plein midi, dans la vallée qui conduit de Mensa à Aïn-Saba. Ce Lion regarda avec beaucoup d’intérêt le chameau et son maître, mais les laissa tranquillement passer. On a considéré comme fausses les assertions de Le Vaillant et d’autres naturalistes, sur l’habitude qu’a le Lion d’examiner ainsi tout son domaine ; cependant j’ai eu occasion de vérifier le fait par moi-même. Nous avons vu un lion couché sur une colline aride et rocheuse, où il ne pouvait évidemment être qu’en explorateur, afin de s’assurer dans quelle partie des environs il trouverait le plus facilement du gibier, la nuit venue.
C’est en vain que, si loin que l’on puisse remonter, Aristote avait reconnu l’absurdité de ces fables ; qu’il en avait même expressément réfuté une partie ; le merveilleux a tellement de charmes pour l’esprit humain, qu’on ne peut se décider à abandonner la fantaisie pour la réalité ; les contes populaires étaient toujours acceptés et finissaient, à force d’être répétés, par se glisser non seulement dans les livres des poètes, mais même dans ceux des naturalistes.
Le nombre des fables, légendes et récits merveilleux, auxquels le Lion s’est trouvé mêlé est considérable. Tout le monde connaît l’histoire du Lion d’Androclès, dont nous avons déjà parlé plus haut. Cette anecdote est attribuée presque dans les mêmes termes à Mentor de Syracuse, à Helpis de Samos, à l’abbé Sérasimos, à saint Gérôme et (avec cette variante qu’il s’agit d’un Lion aveugle à qui la vue a été rendue) à Macaire le confesseur. L’épine dans la patte du Lion est une forme zoologique, dit Angelo de Gubernatis (1) correspondant au héros vulnérable par les pieds.
On affirme que le roi des animaux est d’une galanterie à désespérer un petit maître : car s’il se montre cruel envers les hommes, il se garde bien, assure-t-on, de faire du mal aux femmes ; pas plus d’ailleurs qu’aux petits enfants, ce qui démontre suffisamment, disent les bonnes gens, sa générosité. (A SUIVRE…)
HENRI DEMESSE.
Saisie du texte : S. Pestel pour la collection électronique de la Médiathèque André Malraux de Lisieux (30.I.2009) Texte relu par : A. Guézou
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Diffusion libre et gratuite (freeware)
Texte établi sur un exemplaire (BmLx : nc) de l’ouvrage Les Animaux chez eux illustré par Auguste Lançon (1836-1887) paru chez L. Baschet à Paris en 1882.
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