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Le Chien 6

Posté par othoharmonie le 20 novembre 2011

 

Par G. de Cherville 

 

Lorsque Descartes eut promulgué son arrêt sur l’automatisme des bêtes, un de ses adversaires, le Père Bougeant, entreprit de le Le Chien 6 dans CHIENréfuter en démontrant dans un gros livre que ces bêtes étaient des diables, ce qui indiquait qu’il ne trouvait pas que ce fût l’esprit qui leur manquât. Depuis que cette question est sortie du domaine de la métaphysique pour entrer dans celui des études expérimentales, la doctrine cartésienne a perdu de son autorité. G. Leroy, Réaumur, Cuvier, l’avaient tour à tour battue en brèche, et l’admirable travail synthétique de Flourens lui a porté un coup décisif. 

 

En dépit du proverbe « on n’est trahi que par les siens, » les contempteurs de l’intelligence des animaux ne se rencontrent jamais parmi les gens qui vivant au milieu d’eux les étudient à chaque heure de la journée et dans chaque acte de leur existence. 

 

Avancez que le Chien est une simple machine, devant ce que vous voudrez de veneurs, de chasseurs, de bergers, de bouviers, etc., il ne s’en trouvera pas un seul qui ne hausse les épaules, et les plus sincères vous exprimeront immédiatement la part qu’ils prennent à l’accident qui vous arrive ! La négation de l’intelligence animale appartient généralement à ceux qui ont été le moins à même de l’apprécier. A défaut des métaphysiciens, braves philosophes, planant trop haut pour bien juger de ce qui se passe si bas, vous ne retrouvez ces conclusions que dans cette catégorie de savants qui physiologisent le scalpel à la main et dont les relations avec le Chien commencent et finissent dans le laboratoire où le sujet de leurs études a été déposé muselé et ficelé comme un mouton d’abattoir. 

 

A côté de la doctrine qCane Corso Italiano.jpgui entend réduire le Chien à ses seuls instincts, il est une école qui, péchant par l’excès contraire, arrive à le doter si libéralement sous ce rapport que nous serions réduits à lui porter envie. Ce ne sont pas seulement par quelques fables romanesques plus ou moins ingénieuses que se traduisent ces tendances, l’anecdote, le fait divers ont versé également sur cette pente du merveilleux et, en raison de l’immense publicité qu’elles trouvent dans la presse, des invraisemblances s’accréditent. Les récits fantaisistes de quelques écrivains en quête de copie ont distancé de fort loin ce Chien étonnant, lequel, ayant à rapporter le charbon incandescent que lui avait jeté son maître, commença par l’éteindre avec l’arrosoir que lui fournissait la nature ! 

 

Incontestablement doué d’une certaine dose d’intelligence, le Chien raisonne, mais seulement sur des idées d’un ordre particulier et selon que ses sens les lui présentent. Il compare, mais par rapport à quelque circonstance tangible attachée aux objets eux-mêmes ; il est incapable de former une abstraction, de déduire un raisonnement complexe de ses perceptions comme de ses sensations. (A SUIVRE…) 

 

 

CHERVILLE, Gaspard de Pekow marquis de (1821-1898) : Le Chien (1882). 

 



Saisie du texte : S. Pestel pour la collection électronique de la Médiathèque André Malraux de Lisieux (23.VII.2002)
Texte relu par : A. Guézou
Adresse : Médiathèque André Malraux, B.P. 27216, 14107 Lisieux cedex
-Tél. : 02.31.48.41.00.- Fax : 02.31.48.41.01
Mél : mediatheque@ville-lisieux.fr, [Olivier Bogros] 100346.471@compuserve.com

http://www.bmlisieux.com/ 



Diffusion libre et gratuite (freeware) 



Texte établi sur un exemplaire (BmLx : nc) de l’ouvrage Les Animaux chez eux illustré par Auguste Lançon (1836-1887) paru chez L. Baschet à Paris en 1882. 



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Le Chien 7

Posté par othoharmonie le 20 novembre 2011

 

Par G. de Cherville 

 

J’ai eu un Chien tellement frileux qu’il choisissait très souvent pour niche un espace qui avait été ménagé sous le foyer de la drahthaarcuisine ; il s’enfournait bravement là-dessous et jamais je n’ai pu comprendre comment il ne lui est jamais arrivé d’en sortir absolument cuit. Lorsque le feu n’était pas allumé, sa mauvaise humeur était visible et il en multipliait les témoignages. Une vocation aussi décidée m’inspira l’idée d’essayer si son intelligence irait jusqu’à se procurer à lui-même ce qu’il aimait par-dessus tout. Un joli petit bûcher de fagots fut arrangé dans l’âtre, on le couvrit de copeaux, on plaça devant une petite lampe allumée et le Chien fut enfermé dans la cuisine avec ses éléments de la plus joyeuse des flambées. 

 

Bien que le froid fût très vif, il ne l’inspira pas le moins du monde ; assis sur sa queue devant le brasier en expectative, grognant, rognonuant, évidemment étonné du peu de calorique qu’il récoltait, il ne comprit jamais qu’en touchant les copeaux du bout de sa patte, ceux-ci tomberaient sur le lumignon et provoqueraient l’incendie après lequel il aspirait. Cette expérience, je l’ai renouvelée trois ou quatre fois sans plus de succès. 

 

Il n’est certainement pas difficile d’amener à la pratique de la propreté la plus stricte, le Chien que l’on s’est donné pour commensal, mais en eût-il le fanatisme que le pauvre animal n’en est pas moins l’esclave de son estomac, et il est telle nuit où force lui est bien de réveiller le maître. Pour y parvenir le moyen le plus rationnel serait de secouer le dormeur ou tout au moins de tirer les draps, la couverture dont il s’enveloppe ; mais ce moyen est encore complexe et, sans rien jurer, je doute fort que l’intelligence du Chien soit susceptible de se l’approprier. En pareil cas, tous les camarades de chambre que je me suis donnés se bornaient à se plaindre, à gémir, sans même aller jusqu’à l’aboi, en sorte que je ne sais pas même s’ils se rendaient un compte bien exact de l’engourdissement dans lequel j’étais plongé. 

 

La jalousie immatérielle, celle qui n’a pas un appétit pour mobile, une jouissance pour loi, n’existe que chez les animaux à l’état de domestication. Ce sentiment vraiment humain quand un de ces êtres nous l’emprunte, ce n’est presque jamais à un de ses semblables qu’il l’applique ; s’il y cède, s’il prétend à l’accaparement d’une affection, ce sera de celle de l’homme, du maître ; il n’est peut-être pas de plus éclatant témoignage de l’humilité avec laquelle les bêtes reconnaissent la supériorité de notre espèce sur la leur. (A SUIVRE…) 

 

CHERVILLE, Gaspard de Pekow marquis de (1821-1898) : Le Chien (1882). 

 



Saisie du texte : S. Pestel pour la collection électronique de la Médiathèque André Malraux de Lisieux (23.VII.2002)
Texte relu par : A. Guézou
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Le Chien 8

Posté par othoharmonie le 20 novembre 2011

 

Par G. de Cherville 

 

J’ai observé pendant plusieurs années un chenil qui renfermait toujours de vingt à vingt-cinq animaux ; j’ai reconnu qu’il existait CavalierKgChas2 wb.jpg.jpgentre ce que je me permettrai d’intituler leurs caractères des nuances très tranchées, parfois fort originales. Je les ai vus subir la domination du plus fort, se résigner aux caprices du plus hargneux avec une passivité que la race humaine n’eût pas désavouée, accabler les faibles, les souffreteux, appuyer d’un coup de dent le coup de fouet tombant sur l’échine du voisin, tout cela avec une lâcheté qui malheureusement ne leur est pas spéciale. Jamais je n’ai surpris chez aucun d’eux les symptômes d’une préférence bien marquée pour tel ou tel de ses camarades, partant nulle trace de jalousie. Par exemple, si le piqueur s’avisait de caresser un de ces messieurs, toute la société était en effervescence, chacun protestait sans unisson, c’était un tapage à vous rendre sourd. 

 

Ce sentiment arrive chez le Chien à des proportions vraiment humaines ; c’est lui que le proverbe aurait dû choisir comme type de la jalousie bien plutôt que le Tigre. Quand il s’agit de l’amitié du maître, tout lui porte ombrage ; non seulement, il souffre difficilement que celui-ci en fasse une part, si mince qu’elle soit, à un autre animal, mais il est, visiblement, très douloureusement affecté, lorsque les témoignages de l’affection de ce maître, s’adressent à quelque bipède ; en pareil cas, son œil, cet œil qui est le raccourci d’une physionomie, s’alanguit, devient humide et la tête se détourne avec une résignation consternée. 

 

Le Chien 8 dans CHIEN 220px-Cavalier-king-charlesC’est principalement à l’endroit des enfants que cette jalousie se manifeste. La fille d’un fonctionnaire de l’administration des forêts s’était prise d’amitié pour un énorme braque que son père avait ramené d’Allemagne. L’animal était si doux, il se prêtait avec tant de complaisance aux caprices de sa petite maîtresse, un vrai tyran, il lui témoignait tant d’attachement, enfin, il y avait un contraste si piquant dans la domination de cette frêle blondine sur cette bête gigantesque que les parents encouragèrent la liaison et permirent que le Chien dormît, pendant la nuit, sur un tapis devant le lit de son amie. 

 

La situation se modifia quand on ramena de la campagne un second enfant qui était en nourrice. Le braque fut complètement délaissé pour le petit frère que sa sœur aimait beaucoup et avec lequel elle pouvait jouer à la maman. L’abandonné en conçut une irritation manifeste, il devint triste, morose ; quand la petite fille embrassait le baby, il levait sur elle des yeux sanguinolents, il grondait sourdement. On s’en amusait. 

 

Un jour que les enfants étaient restés seuls avec leur compagnon, et que l’aînée berçait le petit garçon sur ses genoux, le braque, sans provocation aucune, s’élança sur celui-ci et, d’un coup de dent, lui enleva un morceau de joue. Aux cris on était accouru. Tandis qu’on emportait les enfants, le père avait pris un pistolet et tiré sur le Chien. Atteinte mortellement, la misérable bête eut encore la force de se traîner dans la chambre où l’on avait transporté sa petite maîtresse, et ce fut sur son tapis et les yeux fixés sur elle qu’elle expira. 

 

Nous avons dit plus avant que le croisement du Chien et du Loup pouvait se réaliser même dans la vie sauvage ; ces sortes d’unions libres étonnent surtout ceux qui, en pratiquant la chasse de notre unique grand carnassier, se sont familiarisés avec ses Otterhund.jpgmœurs. 

 

Pour caractériser la situation de deux irréconciliables, on dit : ils sont comme Chien et Chat ; on exprimerait bien plus fortement les proportions extrêmes de l’inimitié en disant comme Chien et Loup. Si le premier dérive du second comme on le prétend, celui-ci n’en honore pas moins son petit cousin d’une haine très profonde et comme cette animosité se double d’un goût très prononcé pour sa chair, jamais il ne laissera échapper l’occasion de dîner, non pas avec, mais de tous les Chiens sur lesquels il pourra poser sa griffe. (A SUIVRE….) 

 

 

CHERVILLE, Gaspard de Pekow marquis de (1821-1898) : Le Chien (1882). 

 



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Le Chien 9

Posté par othoharmonie le 20 novembre 2011

 

Par G. de Cherville 

 

Le Chien 9 dans CHIEN 220px-RasteauPyrrhusDans les villages forestiers, ceux de ces derniers qui s’aventurent dans la campagne après le coucher du soleil, les braques, les épagneuls qui s’attardent dans les bois sont des Chiens parfaitement perdus ; y eût-il des Moutons dans le voisinage, ce sera toujours sur ces Chiens isolés que le Loup fixera ses préférences. Ce qui est encore assez étrange, c’est que ces mêmes Loups traiteront avec une certaine déférence les Chiens courants des meutes qui leur ont donné la chasse, même quand ils sont isolés, même quand ils ne sont pas de taille à opposer une bien vive résistance. Il nous est bien souvent arrivé de perdre en fond de forêt plusieurs de ces Chiens qui y passaient la nuit, on nous les a toujours ramenés sains et saufs. Chiens d’arrêt, nous n’en aurions retrouvé que les os. Pourquoi ce privilège ? Probablement parce que le Loup se souvient et compare ; parce qu’il se rappelle les angoisses qu’il a dû à de tels Chiens, parce qu’il sait qu’ils marchent toujours en nombre et accompagnés et que sa prudence l’emporte sur les suggestions de sa haine et de son appétit. 

 

ThemisDouCoudounie.jpgDans l’espèce canine, c’est surtout par la terreur que se traduit l’antipathie si profonde des deux races. Cette terreur elle est instinctive, elle est innée. Il n’est nullement besoin d’un acte de guerre pour apprendre au Chien qu’il est en présence de son implacable ennemi ; l’odeur du Loup, même lorsque pour la première fois elle frappe son odorat, une odeur caractéristique dont son instinct a la prescience, suffit à lui apprendre à qui il a affaire et, en pareil cas, chez l’immense majorité de ces animaux, chez tous ceux qui n’appartiennent pas à quelques variétés spéciales, les poils se hérissent, les yeux sont hagards, ils tremblent et multiplient les signes de l’épouvante. 

 

Ce court aperçu des sentiments que ces Capulets et ces Montaigus nourrissent les uns pour les autres donne la mesure de l’originalité que doit affecter, dans la solitude des grands bois, la première entrevue de ce soupirant à demi paralysé par la terreur et cette belle qui doit se demander si elle cédera ou à la faim ou à l’amour. 

 

Il est cependant incontestable que de loin en loin, c’est le dieu malin qui l’emporte. En 1864, le fils de M. le docteur Chenu tua dans les bois de Lahoussaye-Crécy un Loup complètement noir, qu’il aurait pris pour un Chien, s’il n’avait vu quelques instants auparavant la Louve accompagnée de plusieurs Louvards au pelage également très foncé, qui furent tués quelque temps après ainsi que la mère. Le père était un Chien noir appartenant à un cultivateur de Nangis, il avait été vu plusieurs fois en compagnie de la Louve. 

 

Des portées de Chiens-Loups ont été trouvées dans des forêts de la Sarthe et de la Mayenne ; l’un de ces animaux fut élevé par un de nos amis, il tenait beaucoup plus du Chien de Terre-Neuve que du Loup. (A SUIVRE….) 

 

 

CHERVILLE, Gaspard de Pekow marquis de (1821-1898) : Le Chien (1882). 

 



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Le Chien 10

Posté par othoharmonie le 20 novembre 2011

 

Par G. de Cherville 

 

Beagle-Harrier-fr.jpgVoici enfin un fait plus récent, dont l’authenticité est établie par des témoins dont la véracité ne saurait être mise en doute. Depuis trente ans, les Loups sont rares dans l’Ile-de-France, où la surveillance des gardes est loin d’être aussi chimérique que dans les autres départements ; cependant, il y a trois ans, une Louve s’était établie dans la forêt de Villefermoys où sa présence fut longtemps sans être signalée, parce que, fidèle aux traditions de sa race, elle résistait stoïquement aux tentations que devait exercer sur elle le gibier qui fourmille dans ce massif, et s’en allait exercer ses déprédations à des distances assez considérables de ses domaines. 

 

Cette Louve exemplaire ne sut pas imposer à son cœur la discrète réserve que pratiquaient ses appétits. Si Loup qu’on soit, il vient une heure où la solitude semble pesante. L’heure ayant sonné pour notre ermite, elle chercha d’abord autour d’elle, puis dans tous les couverts qui lui étaient familiers, mais l’écho seul répondant aux hurlements sinistres par lesquels elle troublait le silence des nuits, elle chercha un équivalent à l’animal de son espèce qui s’obstinait à ne pas venir. 

 

Il y avait auprès de la forêt un gros Chien, moitié dogue et moitié terrier, qui avait pour emploi de surveiller et de défendre l’habitation fort isolée du sieur Boyer, garde particulier de M. T…, propriétaire du château des Bouleaux. Ce fut sur ce Chien que la Louve jeta son dévolu et, renversant toutes les traditions, elle séduisit le Chien terrier et disparut avec lui, un véritable rapt. 

 

Le Chien 10 dans CHIEN 220px-German_Shepherd_Dogs_portraitQuelques jours après M. T…, se promenant à cheval dans Villefermoys, vit la Louve sauter la route à cinquante pas de lui et derrière la Louve, lui emboîtant le pas, un Chien dans lequel il reconnut immédiatement celui de son garde. Il essaya de les poursuivre en poussant son Cheval à travers bois, mais l’un et l’autre se perdirent dans le fourré. Il rencontra des bûcherons qui lui racontèrent que plusieurs fois déjà ils avaient aperçu cette Louve et le Chien de Boyer allant de compagnie. 

 

Après une douzaine de jours, le Chien terrier réintégra la civilisation ; si les amours ne sont pas plus éternelles dans le monde des Loups que dans le nôtre, les ruptures n’y sont pas moins orageuses. L’infortuné n’avait pas été tout à fait mangé, mais tout son corps portait des traces de coups de griffes et de dentées. 

 

Cependant l’aventure ayant ébruité le secret de l’existence de la Louve, l’amodiataire de Villefermoys, M. le comte de G…., très jaloux de la conservation de ses admirables chasses, ordonna des battues pour les délivrer de ce commensal redoutable. La Louve échappa en forçant la ligne des traqueurs ; mais ceux-ci trouvèrent le liteau, qui renfermait trois petits ; l’un d’eux, absolument Loup par la forme et par le pelage, a été conservé par M. le comte de G… ; les deux autres, chez lesquels le métissage était nettement accusé par la forme des oreilles et par les balzanes de leurs pattes, furent envoyés au Jardin des Plantes. 

 

220px-Berger_allemand_en_montagne dans CHIENLa pièce a un second acte. Comme vous venez de le voir, la Louve avait sauvé sa peau ; après quelques jours de retraite, elle rentra en Villefermoys, y reprit ses demeures et ses habitudes, s’efforçant de mériter l’indulgence par sa modération locale. Au printemps suivant, volage et fidèle tout à la fois, elle revint à son Chien terrier, qui, après une fugue comme l’année précédente, comme l’année précédente aussi revint au logis, battu, pas content, mais probablement disposé à recommencer une troisième fois cette petite excursion dans la société des ennemis mortels de son espèce, si une balle bien plantée n’était pas venue dénouer ce petit roman forestier par la mort de son héroïne. (A SUIVRE

 

 

CHERVILLE, Gaspard de Pekow marquis de (1821-1898) : Le Chien (1882). 

 



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Le Chien 11

Posté par othoharmonie le 20 novembre 2011

Par G. de Cherville 

La description des innombrables variétés de la race canine ne serait point à sa place dans ces esquisses. Buffon, qui vivait dans Tervueren.jpgun temps où les arbres généalogiques tenaient le haut du pavé, a dressé celui des Chiens qui peuplent les deux hémisphères en établissant la probabilité des croisements dont chacun d’eux est sorti. Le travail est ingénieux comme tout ce qu’enfanta le cerveau de ce grand homme, mais, comme bien d’autres parties de son œuvre, il n’en fournit pas moins quelque prise à la critique. 

Il nous paraît un peu puéril de s’évertuer à ramener tous les Chiens du globe à un type souche unique de tous les autres. On prétend témoigner, ce faisant, de son respect pour le texte biblique ; on ne s’aperçoit pas que l’on montre une fort mince opinion de la toute-puissance créatrice ; cet hommage à la parole divine tend à amoindrir celui dont elle émane. Quand on lâche la bride aux conjectures, pourquoi ne pas admettre trois créations canines primordiales, celles du dogue, du lévrier et du Chien de berger, répondant à trois besoins de l’homme primitif, la défense, la poursuite des animaux sauvages, la garde des troupeaux. La supposition simplifierait la tâche des généalogistes ci-dessus et deux êtres de plus à tirer de l’argile étaient, en vérité, une petite besogne pour celui qui, d’une main si prodigue, semait les astres dans l’espace. 

Le Lévrier nous paraît donc l’auxiliaire indiqué du premier chasseur, nu et sans autre arme qu’un bâton, et qui, pour s’emparer des animaux, devait les atteindre à la course ; la faiblesse de ses qualités d’odorat n’avait aucun inconvénient dans ces temps primitifs où le gibier pullulait et n’avait pas encore appris à se garder des embûches humaines. Le lévrier est également très imparfaitement doué sous le rapport de l’intelligence, très développée au contraire chez le Chien de berger ; celui-ci est un moule supérieur ; il affirme à côté de cette intelligence les qualités de fidélité, de dévouement, les aptitudes à se plier aux volontés humaines qui ont mérité au Chien une place à part parmi nos animaux domestiques ; avec le dogue qui fournissait la puissance musculaire, la force, une indomptable intrépidité pour compléter le trio, tous les dérivés se justifient et s’expliquent. (A SUIVRE…) 

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Le Chien 12

Posté par othoharmonie le 20 novembre 2011

Par G. de Cherville 

Examinons donc succinctement le Chien d’aujourd’hui dans ses trois grandes attributions, la garde des troupeaux, la défense de la maison et la chasse. 

European Groenendael male.jpgLa sympathie que la race nous inspire se change, quand il s’agit du Chien de berger, en une sorte d’admiration presque respectueuse. Ah ! le noble et vaillant animal, martyr obscur du devoir, expression de l’abnégation poussée chez le serviteur jusqu’à ses plus extrêmes limites. 

Voyez-le, efflanqué, décharné, avec sa toison inculte, dont les mèches agglutinées ne déguisent qu’imparfaitement sa maigreur, son profil aigu, ses oreilles pointues et demi-tombantes, et son œil brun rayonnant d’intelligence et d’ardeur, sentinelle vigilante passant et repassant d’un pied infatigable sur la ligne que ne doivent pas franchir les moutons confiés à sa surveillance. Sans cesser d’exécuter sa consigne, la sentinelle reste attentive aux ordres du maître ; au moindre signe il s’élance, repousse dans le rang une bête qui s’était laissée tenter par quelque touffe verdoyante, puis reprend sa promenade. Faut-il mettre le troupeau en mouvement, il s’élance, pousse à droite, charge à gauche, aboie à ceux qui ne se décident pas assez vite à suivre la colonne, mais en s’en tenant toujours à la menace, voltige sur ses flancs, se reporte à l’arrière-garde, harcèle les traînards, dirige, maintient leur cohue qu’au besoin il saurait défendre. 

Car, après sa journée si laborieusement remplie, seul, il ne trouvera pas dans le sommeil le repos réparateur dont il aurait besoin ; le sien est encore une faction. Couché sous la cabane du maître, mais toujours aux aguets, l’œil ouvert, l’oreille attentive, il quitte son abri pour faire une ronde autour du parc qui protège le peuple moutonnier, écoutant les bruits qui traversent le silence des nuits, éventant longuement les émanations que lui apporte la brise, essayant d’y surprendre l’odeur caractéristique de l’ennemi, qu’il appréhende sans le craindre comme tant d’autres Chiens, et avec lequel en cas d’assaut il n’hésiterait pas à lutter. Et pour tant de fatigues, pour ce labeur de jour et de nuit, pour tant d’efforts, pour tant de luttes, pour tant de dévouement, il n’a, le pauvre animal, d’autre salaire qu’un morceau de pain noir, le plus souvent tout juste suffisant pour l’empêcher de mourir, et, de loin en loin, quelque réconfortante caresse du berger dont il est l’adjudant. 

Le Chien 12 dans CHIEN 240px-BarbarLes traits d’intelligence du Chien de berger son innombrables, nous n’en citerons qu’un seul qui témoigne combien il a le sentiment de sa mission ; il y a quelques années, après de longues pluies, la Sarthe démesurément grossie avait commencé à couvrir les prairies qu’elle traverse. Cependant le soleil s’étant montré, un fermier, qui voulait faire prendre l’air à son troupeau, ordonna à son berger de le conduire dans un pacage situé dans les bas-fonds. Dans la journée, l’inondation avait pris des proportions considérables ; un petit chemin qu’il fallait traverser pour revenir au village avait été gagné par les eaux qui y coulaient avec une rapidité de torrent ; le berger, un enfant, eut l’imprudence de s’y engager ; ce fut à grand’peine qu’il gagna lui-même le bord opposé, et, sous ses yeux, une vingtaine de ses moutons furent emportés par le courant. Le pauvre petit perdant la tête courut à la ferme, les paysans arrivèrent en nombre ; on retrouva sept de ces moutons à plus d’un kilomètre, paissant paisiblement sur un îlot où le Chien, qui s’était laissé aller à la dérive avec eux, les avait tirés les uns après les autres, sous les yeux d’un meunier témoin de ce curieux sauvetage.

 Nous avons bien des variétés de Chiens de garde, mais ce sont les boule-dogues et les Terre-Neuve qui, pour le quart d’heure, sont en possession de la confiance de la grande majorité des propriétaires.  (A SUIVRE…) 

CHERVILLE, Gaspard de Pekow marquis de (1821-1898) : Le Chien (1882). 



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Le Chien 13

Posté par othoharmonie le 20 novembre 2011

 

Par G. de Cherville 

 

Le Chien 13 dans CHIEN 320px-Bouledogues_fran%C3%A7aisJ’en veux au boule-dogue du tort que sa méchante réputation, sa physionomie bestialement farouche font à l’ensemble de l’espèce canine. Ses déplorables fréquentations, un patronage au moins suspect sont loin de le réhabiliter dans mon opinion ; mais, si je me refuse à reconnaître les grâces de cette mâchoire proéminente dont les canines menaçantes semblent toujours disposées à faire la connaissance de vos mollets, je n’en crois pas moins que la férocité de cet animal est un peu surfaite. 

 

En tout cas cette férocité serait notre œuvre. Nous avons voulu perfectionner notre Chien de défense, nous y sommes arrivés par la sélection et les croisements, nous avons fabriqué un spécimen de toute la force musculaire, de tout l’indomptable courage dont la race canine est susceptible, nous avons inventé le boule-dogue. Voulez-vous avoir une idée de ce qu’il peut posséder de vaillance, du degré de lâche imbécillité dont la race humaine est capable ? 

 

Un Anglais paria que, de deux en deux minutes, il couperait une patte à une Chienne de cette espèce qu’il possédait et qu’elle n’en continuerait pas moins de combattre un Taureau. Cette immonde gageure fut exécutée et gagnée ; malgré trois mutilations successives, la Chienne continua la lutte ; à la quatrième, elle se coucha aux pieds de ce barbare où elle expira. 

Sous prétexte que nous sommes les éditeurs responsables de l’humeur batailleuse du boule-dogue, je ne prétends point l’en décharger. 

 

200px-Bou dans CHIENDressé au combat contre d’autres animaux de son espèce il résiste rarement à la tentation de livrer bataille à ceux de ses confrères qu’il rencontre. Il est assez rare que l’homme ait été l’objectif de son éducation, mais enfin cela arrive et en pareil cas il serait infiniment dangereux de s’y fier ; en revanche, de très nombreuses observations m’ont démontré que ce Chien, lorsque nous n’avons pas accentué son tempérament, stimulé ses penchants, lorsque nous ne lui avons pas appris à mordre, n’est ni plus méchant, ni plus hargneux qu’un autre, j’ajoute que je le crois d’une possession infiniment moins dangereuse que le Terre-Neuve. 

 

Les nombreux amis que cette race insulaire compte en France accueilleront mal cette insinuation. Ce sauveteur jouit d’une réputation qui, pour être générale, n’en est pas mieux méritée ; il bénéficie aussi du préjugé qui fait de la bonté et de la douceur le partage de tous les ventrus. 

 

Ne discutons pas l’authenticité de ses exploits professionnels ; concédons le caractère paterne qu’affecte cet extérieur encore plus massif que majestueux, une analyse attentive de la physionomie nous renseignera sur ce que nous devons attendre de ces dehors débonnaires et pacifiques. 

 

200px-FrenchBulldogCette physionomie, elle tient tout entière dans l’œil, chez l’homme le miroir de l’âme et qui chez le Chien révèle plus que ses instincts. Cet œil du terre-neuve est relativement plus petit que dans aucune autre race, presque toujours sanglant, dès que l’animal a dépassé sa troisième année ; vous y chercherez vainement les expressions caressantes et tendres, quelquefois joyeuses et provocantes, toujours franches, toujours expansives à l’aide desquelles d’autres Chiens remplacent la parole qui leur manque ; l’œil du terre-neuve est un œil muet ; une vague sournoiserie, encore accentuée par un fréquent clignotement des paupières, voilà le sentiment qu’expriment le plus souvent ses prunelles. Le caractère répond à ces prémisses ; le terre-neuve n’est pas hargneux vis-à-vis de ses semblables, il faut le reconnaître, mais il est brutal, quinteux, sujet à des colères sans prétexte. La paresse est de tous les péchés capitaux le seul qui le passionne ; il s’y livre avec délices et gare à qui le trouble dans cette jouissance. 

(A SUIVRE…) 

 

 

CHERVILLE, Gaspard de Pekow marquis de (1821-1898) : Le Chien (1882). 

 



Saisie du texte : S. Pestel pour la collection électronique de la Médiathèque André Malraux de Lisieux (23.VII.2002)
Texte relu par : A. Guézou
Adresse : Médiathèque André Malraux, B.P. 27216, 14107 Lisieux cedex
-Tél. : 02.31.48.41.00.- Fax : 02.31.48.41.01
Mél : mediatheque@ville-lisieux.fr, [Olivier Bogros] 100346.471@compuserve.com

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Diffusion libre et gratuite (freeware) 



Texte établi sur un exemplaire (BmLx : nc) de l’ouvrage Les Animaux chez eux illustré par Auguste Lançon (1836-1887) paru chez L. Baschet à Paris en 1882. 



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Le Chien 14

Posté par othoharmonie le 20 novembre 2011

 

Par G. de Cherville 

 

De tous les animaux domestiques, le Chien est celui qui oublie le plus vite et pardonne le plus aisément les mauvais traitements dont il a été l’objet ; le terre-neuve fait exception à cette règle générale, non seulement il connaît la rancune, mais chez lui elle est singulièrement vivace. 

 

Le Chien 14 dans CHIEN 284px-Newfoundland_brownUn palefrenier avait chassé, avec quelques coups de fourche, un Terre-Neuve qu’il avait trouvé couché sur le foin de ses chevaux. Deux mois après, un jour qu’il était accroupi pour botteler de la paille, ce terre-neuve, que vingt fois il avait caressé depuis, s’élança sur lui, le renversa et lui eût fait un mauvais parti si on ne fût pas accouru à son aide. Si les étrangers, les passants, les visiteurs sont autorisés à se méfier des boule-dogues, les Terre-Neuve, moins intelligents, moins dociles, sont infiniment plus redoutables pour leurs maîtres. 

 

Nos confrères, en particulier, feront acte de sagesse en ne choisissant pas leurs amis intimes dans cette race ; je dois les prévenir qu’elle manifeste pour la chair des gens de lettres une prédilection aussi désobligeante que flatteuse. C’est un Terre-Neuve et un Terre-Neuve qu’il avait rendu presque célèbre qui faillit dévorer Alphonse Karr ; la main si loyale, à l’étreinte si cordiale, qui a écrit les Mousquetaires et Monte-Christo, fut un jour horriblement déchiquetée par un métis de cette espèce ; Alexandre Dumas porta le bras en écharpe pendant plus de trois mois. Un imprimeur de Bruxelles, M. Bienez, lisait le journal assis dans son jardin ; la feuille lui échappant tomba sur son Chien qui sommeillait à ses pieds ; le Terre-415px-Irischer_Wolshund dans CHIENNeuve, réveillé en sursaut, s’élança sur son maître, et, d’un coup de dent, lui arracha complètement l’œil gauche. Avouez que c’est le cas ou jamais de répéter avec le fabuliste : mieux vaudrait un sage ennemi. 

 

Nous avons dit que le lévrier devait avoir été le premier Chien que l’homme ait utilisé pour la chasse. Son seul aspect indique le but pour lequel il avait été construit. Jamais attributions ne furent plus éloquemment traduites par l’extérieur. La tête fine, d’une légèreté remarquable, ne charge pas l’avant-main, remarquable à la fois par la force et l’épaisseur des muscles du cou qui jouent un rôle si important dans la projection, et par l’ampleur et la profondeur de la poitrine. Chez lui, comme chez tous les animaux rapides, les membres postérieurs sont remarquablement plus développés que les antérieurs, les pattes sont longues sans être grêles, tendineuses et sèches ; les os d’un grain très serré et d’une densité extraordinaire. L’abdomen est fortement retroussé, la queue longue, mince et décharnée. Il a peu de nez, mais son ouïe est fine et sa vue perçante. (A SUIVRE…) 

 

CHERVILLE, Gaspard de Pekow marquis de (1821-1898) : Le Chien (1882). 

 

 

 

 

 



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Texte relu par : A. Guézou
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Le Chien 15

Posté par othoharmonie le 20 novembre 2011

 

Par G. de Cherville 

 

Galgo espagnol Hembra.jpg.jpgD’après Buffon, le lévrier serait venu du mâtin, transporté dans les pays méridionaux, où sa taille se serait développée ; puis aurait diminué progressivement lorsqu’il aurait été réimporté dans le nord pour aboutir en Angleterre aux levrettes et aux levrons. Il ne manque pas d’arguments pour battre en brèche cette explication fantaisiste. Si les similitudes physiologiques signifient quelque chose, le lévrier est moins rapproché du mâtin que du Chien de berger dont il a le ventre harpé, le museau effilé et l’énergie musculaire. Les grands lévriers ont existé au nord dans l’antiquité. Les vertagi, les Chiens si recherchés des Romains venaient de la Gaule. Ovide compare Apollon poursuivant Daphné à un lévrier gaulois chassant un lièvre, et qui, près de le saisir, s’allonge et précipite sa course. La taille de ces animaux diminue si peu dans les contrées septentrionales que l’Irlande en possédait une race gigantesque, éteinte aujourd’hui, qui n’avait pas moins de un mètre de hauteur.

 

 Quoi qu’il en soit, en raison des preuves multiples que nous avons de l’antiquité de son existence, il est incontestable que le lévrier a figuré au moins pour une part dans les croisements qui nous ont fourni les variétés de Chiens que nous avons utilisés pour la poursuite des animaux sauvages, depuis le lapin jusqu’au Lion, que nous avons même employés à chasser l’homme, dans les circonstances, assez honteuses pour notre espèce, où l’homme devenait un gibier. 

 

Les premiers descendants du lévrier furent exclusivement des Chiens courants ; le Chien d’arrêt est une création des temps modernes et la date en est indéterminée. Toussenel lui assigne pour origine le développement de l’art de la fauconnerie : « Comme il fallait des Chiens pour faire lever le gibier plume et le gibier poil devant les oiseaux de vol, dit-il, on en a rencontré qui pointaient naturellement la pièce de gibier avant de la faire partir, on a cultivé ces dispositions en prolongeant le pointage jusqu’à l’arrêt solide. On a obtenu par ce moyen le Chien couchant, c’est-à-dire qui se couche contre le gibier qu’il arrête pour se laisser couvrir avec celui-ci sous le filet. Le fusil venu, qui permettait de tirer au vol, le Chien couchant s’est transformé de lui-même en simple Chien d’arrêt. » 

 

Si la poursuite est la seule méthode de chasser qui ait été inspirée au Chien par la nature, il ne nous en semble pas moins que l’arrêt existait en germe dans les aptitudes de l’animal avant sa domestication

 

Le Chien 15 dans CHIEN 252px-Podengo_Portugues« Boire sans soif et faire l’amour en tout temps, voilà ce qui distingue l’homme de la brute, » a dit Figaro. Il aurait pu ajouter marcher sans but et sans prétexte. L’homme est le seul être qui se promène ; l’animal est économe de sa peine et de sa fatigue ; il n’use de ses forces que dans la nécessité stricte qu’exigent ses besoins d’alimentation et de reproduction ; quand il ne travaille pas, il dort. 

 

Avant de se résigner à pourchasser laborieusement sa proie, le carnassier se recueille ; il va tenter de la surprendre, le félin en donnant à la terreur le temps de paralyser la défense de sa victime, les autres en se rapprochant le plus près possible de la proie, en s’immobilisant soit pour rassembler leurs forces, soit pour mieux mesurer leur élan. L’arrêt du Chien existait en germe dans cette courte halte avant la surprise. Il est si bien inné dans la race qu’il n’est pas de chasseur auquel il ne soit arrivé de voir un Chien courant prendre une attitude de pointer devant un lièvre au gîte qu’il n’avait pas éventé. Il est si peu particulier à l’espèce canine qu’un jour dans une forêt de Normandie, nous avons pris pour un Chien un Loup que nous apercevions à cinq ou six cents mètres de l’endroit où nous nous trouvions et qui s’approchait d’un troupeau d’oies en se rasant dans les broussailles, avec des façons qu’un braque n’eût pas désavouées. 

 

Les races françaises de Chiens courants et couchants ont joui longtemps d’une légitime célébrité ; les premières fournissaient des sujets d’une vitesse médiocre, mais doués d’un odorat exquis, puissamment gorgés, aux abois retentissants, aux hurlements formidables tels qu’il convenait dans les forêts abruptes et imparfaitement percées auxquelles ils étaient destinés. Ces races ont à peu près disparu à la suite des croisements multipliés avec les Chiens anglais dont la rapidité avait été retrempée par une addition de sang de lévrier. Nous n’avons pas été beaucoup plus heureux avec nos trois principales espèces de Chiens couchants, braques, épagneuls et griffons, dont l’incurie des propriétaires a si bien amené la dégénérescence qu’aujourd’hui même, chez nous, ce sont les Chiens anglais, pointers et setters, qui tiennent le haut du pavé !  (A SUIVRE….) 

 

 

CHERVILLE, Gaspard de Pekow marquis de (1821-1898) : Le Chien (1882). 



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Le Chien 16

Posté par othoharmonie le 20 novembre 2011

 

Par G. de Cherville 

 

Bouvier Bernois BE.jpgNous avons rapidement esquissé les aptitudes générales du Chien, dessiné quelques traits de son tempérament, il nous reste à l’examiner dans ses facultés réflexes, chez lui caractéristiques et dominantes, plus intéressantes encore que celles qui tient de son seul instinct. Argile essentiellement malléable, le Chien est toujours disposé à recevoir et à garder l’empreinte de la créature humaine dont il aura subi le contact et c’est en cela qu’il s’élève au-dessus de tous les animaux domestiques. Supprimez les rôles qui lui sont attribués dans la chasse, dans la défense, dans la garde des troupeaux, sa valeur ne diminuera pas ; il deviendra moins utile mais il restera la bête aimante et fidèle, aspirant à l’humanité de par la grandeur et le désintéressement de son attachement à son maître, un ami pour lequel il n’y a ni bons ni mauvais jours, la ressource des malheureux, la consolation des déshérités. Le Chien gardera son prestige, tant qu’il restera sur la terre de la place pour une infortune. 

 

On se moque volontiers de ce penchant des vieux pour les bêtes, parce qu’on ne réfléchit pas que pour combler le vide, que pour donner à ce cœur humain que la fièvre de l’affection fera palpiter jusqu’à ce qu’il ait cessé de battre, il faut un aliment que les hommes ne sauraient ou ne daigneraient plus lui fournir. 

 

Je voyais un jour sous une porte cochère une bonne femme qu’entourait un cercle de badauds. Elle était assise par terre contre la muraille, elle avait sur les genoux le corps pantelant d’un Chien, qu’une voiture venait d’écraser. On me raconta le drame. La vieille femme pleurait toujours ; des assistants, les uns riaient, les autres essayaient de la consoler ; enfin levant vers une de ces âmes charitables sa figure ridée toute ruisselante de larmes : « Ce n’était qu’un Chien, je le sais bien, s’écria-t-elle : mais c’était ma petite fille morte elle aussi qui l’avait élevé, avec qui désormais pourrai-je parler d’elle ? » 

 

Appenzeller Sennenhund 01 K.jpgIl faut bien dire que les hautes qualités aimantes du Chien ne se développent que par la culture. Entre le Chien errant des rues de Constantinople et le Chacal son voisin de l’autre côté du Bosphore, la distance, permettez-moi de dire, morale, n’est pas grande. En revanche, l’instinct de tendresse, de dévouement qui sommeille au cœur de l’animal se développera, s’épanouira toujours aussitôt que l’attention humaine daignera s’arrêter sur lui ; comme ces graines de grands végétaux, enfouies depuis des années sous les dessous forestiers, il lui suffit de ce rayon de soleil pour qu’elle éclose. Les quelques exceptions de roquets rachitiques qui se montrent réfractaires à la reconnaissance ne prouvent rien contre cette règle générale. 

 

L’intelligence subit la même influence et suit la même progression rudimentaire ; dominée par l’instinct chez le Chien qui n’a avec l’homme que des rapports intermittents, comme le Chien de garde et les Chiens de meute, elle s’affirme de plus en plus vive, de plus en plus pénétrante chez ceux que leur destination met dans un contact permanent avec leurs maîtres ; c’est surtout dans l’observation des races d’arrêt que l’on peut se rendre compte de cette différence.

 

 Admirablement doué sous le rapport de la vigueur et de l’odorat, dressé avec une perfection à laquelle nous n’arrivons jamais, le Chien anglais, pointer ou setter, est le plus merveilleux des instruments de chasse, mais ce n’est qu’un outil, qui, en dehors de son rôle, ne vous surprendra jamais par quelque trait qui s’élève au-dessus de l’instinct ; cela parce que ce Chien a été tenu à l’écart, nourri dans un chenil en compagnie d’autres animaux de son espèce, contenu par une discipline de fer et n’a jamais été mis à même, par le rapprochement de l’homme, d’exercer son instinct réflecteur. 

 

Le Chien d’arrêt français, au contraire, est quelquefois un commensal et toujours un ami. S’il n’a pas ses grandes et petites entrées dans l’appartement, son maître manque rarement de le visiter tous les jours ; il le promène, il le caresse, il autorise Le Chien 16 dans CHIEN ancien_chien_d'arret_danoiscertaines petites privautés qui raccourcissent les distances établies par la nature entre le bipède et le quadrupède. Infiniment moins souple, moins réduit que son voisin de l’autre côté du détroit, il a plus d’initiative, moins passif, il est plus capable de ces improvisations qui, devenues légendaires, étonneront les générations. Il a puisé dans la promiscuité de ses relations avec son maître une dose de malice dont l’autre n’est presque jamais susceptible. 

 

Le Chien d’Elzéar Blaze, coupant l’eau avec sa patte afin de mieux saisir les émanations d’une sarcelle blessée qui venait de plonger, devait être un Chien français et peut-être même un Chien gascon ! Chien français celui qui, dans une compagnie, distingue la perdrix blessée et prend sur lui d’aller la chercher à deux ou trois cents mètres dans le buisson où elle est tombée ; Chien français, celui qui, en arrêt dans un fourré, quitte son lapin ou sa bécasse pour venir chercher son maître.  (A SUIVRE…..) 

 

 

CHERVILLE, Gaspard de Pekow marquis de (1821-1898) : Le Chien (1882). 



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Le Chien 17

Posté par othoharmonie le 20 novembre 2011

 

Par G. de Cherville 

 

Le Chien 17 dans CHIEN 8569800-petit-chien-de-race-le-bruxellois-griffonJ’ai eu un grand griffon qui, gâté comme nous les gâtons, était assez sujet à s’emporter. Pour le mettre en garde contre la véhémence de ses passions, j’avais pris l’habitude, avant d’entrer en chasse, de lui administrer une petite raclée de précaution. C’était une manière de lui dire comme le Marseillais : « Juge un peu si tu me fais quelque chose ! » Un jour, au moment de le saisir par la peau du col, je m’aperçus que mon Chien boitait ; mes dispositions flagellantes firent place à une certaine inquiétude. L’examen attentif de la patte et du pied ne me fit cependant rien découvrir, et je me mis en campagne en me disant que le membre malade s’échaufferait probablement par la marche. En effet, il s’échauffa si bien qu’au bout de dix minutes le Chien avait recouvré tous ses aplombs. Mais le lendemain, au moment critique, la claudication reparut, et, depuis lors, je n’avais qu’à toucher mon fouet pour que mon griffon ne marchât plus que sur trois pattes. Cette boiterie préventive, opposée à une correction préventive aussi, est un trait de génie qui ne peut avoir été inspirée que par une profonde intimité avec l’homme ou avec le diable. 

 

Cependant, il faut le reconnaître, à quelque développement intellectuel que puisse arriver le braque, l’épagneul, le griffon, lorsque leur maître les admet à une collaboration continue et intime, ils restent au-dessous de l’humble caniche, le compagnon de l’aveugle, l’ami de l’ouvrier. C’est dans cette espèce qu’il faut chercher les académiciens de la corporation. 

 

Devenir d’une honnête force aux dominos quand on est Chien est relativement bien plus merveilleux que la compilation d’un dictionnaire par une collection de savants. Pourtant, tout en témoignant de ma surprise devant la brillante éducation d’un Munito, il est d’exciter ma sympathie comme son camarade, le guide de l’aveugle, qui, pendant des journées entières, tend aux passants la sébile légendaire ; très au courant des ficelles du métier, sachant demander à être déchargé lorsque le gros tas des sols est devenu tel que la commisération des passants pourrait devenir plus tiède ; le soir venu, reconduisant son maître avec des soins presque filiaux, réglant son pas sur le sien, s’arrêtant précisément lorsqu’il le sent arrivé devant une marche à franchir, toujours attentif, prévenant, ne succombant jamais aux séductions des épaves du tas d’ordure, témoignant d’une telle sollicitude qu’il doit certainement avoir conscience de la terrible infirmité à laquelle il remédie ; devenant commissionnaire au logis, s’acquittant de tous les messages qu’on lui confie avec une étonnante ponctualité et, ce qui est plus rare chez les serviteurs d’aujourd’hui, ne faisant jamais danser l’anse du panier. C’est véritablement du caniche que l’on peut dire qu’il ne lui manque que la parole. 

 

1894731-puppy-debout-dans-l-39-herbe-race--griffon-bruxellois-sept-mois dans CHIENEncore en a-t-on vu qui en avaient acquis le privilège. On a exhibé à Berlin un Chien de cette race qui prononçait une soixantaine de mots. Le maître de ces Chiens, dit la Bibliothèque germanique qui nous fournit ces détails, s’asseyait à terre et prenait l’animal entre ses jambes ; d’une de ses mains il lui tenait la mâchoire supérieure, l’autre se fixait sur celle d’en bas ; le Chien alors commençait à gronder et l’homme soulevait, pressait, écartait les mâchoires de telle façon que ce grondement se modulait en mots parfaitement distincts, mais ne dépassant jamais quatre syllabes. Elisabeth était de tous ces mots celui qu’il prononçait le mieux, puis laquais, salade, thé, café, chocolat, arrivaient également fort nettement à l’oreille. 

 

La gloire du tour de force revenait comme on le voit au bipède, il jouait du Chien comme un autre jouerait de l’accordéon. 

 

Mais il nous paraît probable que, le branle étant donné, nous n’en resterons pas là ; il faut s’attendre à voir surgir un de ces jours le Chien orateur. Pourvu qu’il ne s’avise pas, lui aussi, de nous débiter un speech politique.  (FIN). 

 

 

CHERVILLE, Gaspard de Pekow marquis de (1821-1898) : Le Chien (1882). 



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Le Chat 1

Posté par othoharmonie le 20 novembre 2011

Par Théodore de Banville

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Bombay femelle.JPGTout animal est supérieur à l’homme par ce qu’il y a en lui de divin, c’est-à-dire par l’instinct. Or, de tous les animaux, le Chat est celui chez lequel l’instinct est le plus persistant, le plus impossible à tuer. Sauvage ou domestique, il reste lui-même, obstinément, avec une sérénité absolue, et aussi rien ne peut lui faire perdre sa beauté et sa grâce suprême. Il n’y a pas de condition si humble et si vile qui arrive à le dégrader, parce qu’il n’y consent pas, et qu’il garde toujours la seule liberté qui puisse être accordée aux créatures, c’est-à-dire la volonté et la résolution arrêtée d’être libre. Il l’est en effet, parce qu’il ne se donne que dans la mesure où il le veut, accordant ou refusant à son gré son affection et ses caresses, et c’est pourquoi il reste beau, c’est-à-dire semblable à son type éternel. Prenez deux Chats, l’un vivant dans quelque logis de grande dame ou de poète, sur les moelleux tapis, sur les divans de soie et les coussins armoriés, l’autre étendu sur le carreau rougi, dans un logis de vieille fille pauvre, ou pelotonné dans une loge de portière, eh bien ! tous deux auront au même degré la noblesse, le respect de soi-même, l’élégance à laquelle le Chat ne peut renoncer sans mourir.

Un tiffanyEn lisant le morceau si épouvantablement injuste que Buffon a consacré au Chat, on reconstruirait, si la mémoire en était perdue, tout ce règne de Louis XIV où l’homme se crut devenu soleil et centre du monde, et ne put se figurer que des milliers d’astres et d’étoiles avaient été jetés dans l’éther pour autre chose que pour son usage personnel. Ainsi le savant à manchettes, reprochant au gracieux animal de voler ce qu’il lui faut pour sa nourriture, semble supposer chez les Chats une notion exacte de la propriété et une connaissance approfondie des codes, qui par bonheur n’ont pas été accordées aux animaux. « Ils n’ont, ajoute-t-il que l’apparence de l’attachement ; on le voit à leurs mouvements obliques, à leurs yeux équivoques ; ils ne regardent jamais en face la personne aimée ; soit défiance ou fausseté, ils prennent des détours pour en approcher, pour chercher des caresses auxquelles ils ne sont sensibles que pour le plaisir qu’elles leur font. » O injuste grand savant que vous êtes ! est-ce que nous cherchons, nous, les caresses pour le plaisir qu’elles ne nous font pas ? Vous dites que les yeux des Chats sont équivoques ! Relativement à quoi ? Si tout d’abord nous n’en pénétrons pas la subtile et profonde pensée, cela ne tient-il pas à notre manque d’intelligence et d’intuition ? Quant aux détours, eh ! mais le spirituel Alphonse Karr a adopté cette devise charmante : « Je ne crains que ceux que j’aime, » et, comme on le voit, le Chat, plein de prudence, l’avait adoptée avant lui.  (A SUIVRE…..) 

THÉODORE DE BANVILLE.



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Le Chat 2

Posté par othoharmonie le 20 novembre 2011

Par Théodore de Banville

Angora turc blanc 2.jpgSans doute, il se laisse toucher, caresser, tirer les poils, porter la tête en bas par les enfants, instinctifs comme lui ; mais il se défie toujours de l’homme, et c’est en quoi il prouve son profond bon sens. N’a-t-il pas sous les yeux l’exemple de ce Chien que le même Buffon met si haut, et ne voit-il pas par là ce que l’homme fait des animaux qui consentent à être ses serviteurs et se donnent à lui sans restriction, une fois pour toutes ? L’homme fait du Chien un esclave attaché, mis à la chaîne ; il lui fait traîner des carrioles et des voitures, il l’envoie chez le boucher chercher de la viande à laquelle il ne devra pas toucher. Il le réduit même à la condition dérisoire de porter les journaux dans le quartier ; il avait fait du Chien Munito un joueur de dominos, et pour peu il l’aurait réduit à exercer le métier littéraire, à faire de la copie, ce qui, pour un animal né libre sous les cieux, me paraîtrait le dernier degré de l’abaissement. L’homme oblige le Chien à chasser pour lui, à ses gages et même sans gages ; le Chat préfère chasser pour son propre compte, et à ce sujet on l’appelle voleur, sous prétexte que les lapins et les oiseaux appartiennent à l’homme ; mais c’est ce qu’il faudrait démontrer. On veut lui imputer à crime ce qui fit la gloire de Nemrod et d’Hippolyte, et c’est ainsi que nous avons toujours deux poids inégaux, et deux mesures.

 

BrownVarientAsianCat.JPGEn admettant même que l’univers ait été créé pour l’homme, plutôt que pour le Chat et les autres bêtes, ce qui me paraît fort contestable, nous devrions encore au Chat une grande reconnaissance, car tout ce qui fait la gloire, l’orgueil et le charme pénétrant de l’homme civilisé, il me paraît l’avoir servilement copié sur le Chat. Le type le plus élégant que nous ayons inventé, celui d’Arlequin, n’est pas autre chose qu’un Chat. S’il a pris au Carlin sa face vicieuse, sa tête noire, ses sourcils, sa bouche proéminente, tout ce qu’il y a de leste, de gai, de charmant, de séduisant, d’envolé, vient du Chat, et c’est à cet animal caressant et rapide qu’il a pris ses gestes enveloppants et ses poses énamourées. Mais le Chat n’est pas seulement Arlequin ; il est Chérubin, il est Léandre, il est Valère ; il est tous les amants et tous les amoureux de la comédie, à qui il a enseigné les regards en coulisse et les ondulations serpentines. Et ce n’est pas assez de le montrer comme le modèle des amours de théâtre ; mais le vrai amour, celui de la réalité, celui de la vie, l’homme sans lui en aurait-il eu l’idée ? C’est le Chat qui va sur les toits miauler, gémir, pleurer d’amour ; il est le premier et le plus incontestable des Roméos, sans lequel Shakespeare sans doute n’eût pas trouvé le sien ?

 

(A SUIVRE…) 

 

THÉODORE DE BANVILLE.

 



Saisie du texte : S. Pestel pour la collection électronique de la Médiathèque André Malraux de Lisieux (30.I.2009)
Texte relu par : A. Guézou
Adresse : Médiathèque André Malraux, B.P. 27216, 14107 Lisieux cedex
-Tél. : 02.31.48.41.00.- Fax : 02.31.48.41.01
Mél : mediatheque@ville-lisieux.fr, [Olivier Bogros] 100346.471@compuserve.com

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Texte établi sur un exemplaire (BmLx : nc) de l’ouvrage Les Animaux chez eux illustré par Auguste Lançon (1836-1887) paru chez L. Baschet à Paris en 1882. 



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Le Chat 3

Posté par othoharmonie le 20 novembre 2011

Par Théodore de Banville 

 

Jewelkatz Romeo Of Stalker-Bars.jpgLe Chat aime le repos, la volupté, la tranquille joie ; il a ainsi démontré l’absurdité et le néant de l’agitation stérile. Il n’exerce aucune fonction et ne sort de son repos que pour se livrer au bel art de la chasse, montrant ainsi la noblesse de l’oisiveté raffinée et pensive, sans laquelle tous les hommes seraient des casseurs de cailloux. Il est ardemment, divinement, délicieusement propre, et cache soigneusement ses ordures ; n’est-ce pas déjà un immense avantage qu’il a sur beaucoup d’artistes, qui confondent la sincérité avec la platitude ? Mais bien plus, il veut que sa robe soit pure, lustrée, nette de toute souillure. Que cette robe soit de couleur cendrée, ou blanche comme la neige, ou de couleur fauve rayée de brun, ou bleue, car ô bonheur ! il y a des Chats bleus ! le Chat la frotte, la peigne, la nettoie, la pare avec sa langue râpeuse et rose, jusqu’à ce qu’il l’ait rendue séduisante et lisse, enseignant ainsi en même temps l’idée de propreté et l’idée de parure ; et qu’est-ce que la civilisation a trouvé de plus ? Sans ce double et précieux attrait, quel serait l’avantage de madame de Maufrigneuse sur une marchande de pommes de la Râpée, ou plutôt quel ne serait pas son désavantage vis-à-vis de la robuste fille mal lavée ? Sous ce rapport, le moindre Chat surpasse de beaucoup les belles, les reines, les Médicis de la cour de Valois et de tout le seizième siècle, qui se bornaient à se parfumer, sans s’inquiéter du reste.

 

Cat 0063.JPGAussi a-t-il servi d’incontestable modèle à la femme moderne. Comme un Chat ou comme une Chatte, elle est, elle existe, elle se repose, elle se mêle immobile à la splendeur des étoffes, et joue avec sa proie comme le Chat avec la souris, bien plus empressée à égorger sa victime qu’à la manger. Tels les Chats qui, au bout du compte, préfèrent de beaucoup le lait sucré aux souris, et jouent avec la proie vaincue par pur dandysme, exactement comme une coquette, la laissant fuir, s’évader, espérer la vie et posant ensuite sur elle une griffe impitoyable. Et c’est d’autant plus une simple volupté, que leurs courtes dents ne leur servent qu’à déchirer, et non à manger. Mais tout en eux a été combiné pour le piège, la surprise, Le Chat 3 dans CHAT 220px-Astghik_1l’attaque nocturne ; leurs admirables yeux qui se contractent et se dilatent d’une façon prodigieuse, y voient plus clair la nuit que le jour, et la pupille qui le jour est comme une étroite ligne, dans la nuit devient ronde et large, poudrée de sable d’or et pleine d’étincelles. Escarboucle ou émeraude vivante, elle n’est pas seulement lumineuse, elle est lumière. On sait que le grand Camoëns, n’ayant pas de quoi acheter une chandelle, son Chat lui prêta la clarté de ses prunelles pour écrire un chant des Lusiades. Certes, voilà une façon vraie et positive d’encourager la littérature, et je ne crois pas qu’aucun ministre de l’instruction publique en ait jamais fait autant. Bien certainement, en même temps qu’il l’éclairait, le bon Chat lui apportait sa moelleuse et douce robe à toucher, et venait chercher des caresses pour le plaisir qu’elles lui causaient, sentiment qui, ainsi que nous l’avons vu, blessait Buffon, mais ne saurait étonner un poète lyrique, trop voluptueux lui-même pour croire que les caresses doivent être recherchées dans un but austère et exempt de tout agrément personnel.   (A SUIVRE….) 

 

THÉODORE DE BANVILLE.

 



Saisie du texte : S. Pestel pour la collection électronique de la Médiathèque André Malraux de Lisieux (30.I.2009)
Texte relu par : A. Guézou
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Le Chat 4

Posté par othoharmonie le 20 novembre 2011

Par Théodore de Banville 

 


Le Chat 4 dans CHAT chatonPeut-être y a-t-il des côtés par lesquels le Chat ne nous est pas supérieur ; en tout cas, ce n’est pas par sa charmante, fine, subtile et sensitive moustache, qui orne si bien son joli visage et qui, munie d’un tact exquis, le protège, le gouverne, l’avertit des obstacles, l’empêche de tomber dans les pièges. Comparez cette parure de luxe, cet outil de sécurité, cet appendice qui semble fait de rayons de lumière, avec notre moustache à nous, rude, inflexible, grossière, qui écrase et tue le baiser, et met entre nous et la femme aimée une barrière matérielle.

 

Contrairement à la délicate moustache du Chat qui jamais n’obstrue et ne cache son petit museau rose, la moustache de l’homme, plus elle est d’un chef, d’un conducteur d’hommes, plus elle est belle et guerrière, plus elle rend la vie impossible ; c’est ainsi qu’une des plus belles moustaches modernes, celle du roi Victor-Emmanuel, qui lui coupait si bien le visage en deux comme une héroïque balafre, ne lui permettait pas de manger en public ; et, quand il mangeait tout seul, les portes bien closes, il fallait qu’il les relevât avec un foulard, dont il attachait les bouts derrière sa tête. Combien alors ne devait-il pas envier la moustache du Chat, qui se relève d’elle-même et toute seule, et ne le gêne en aucune façon dans les plus pompeux festins d’apparat !

 

220px-American_Shorthair dans CHATLe Scapin gravé à l’eau-forte dans le Théâtre Italien du comédien Riccoboni a une moustache de Chat, et c’est justice, car le Chat botté est, bien plus que Dave, le père de tous les Scapins et de tous les Mascarilles. A l’époque où se passa cette belle histoire, le Chat voulut prouver, une fois pour toutes, que s’il n’est pas intrigant, c’est, non pas par impuissance de l’être, mais par un noble mépris pour l’art des Mazarin et des Talleyrand. Mais la diplomatie n’a rien qui dépasse ses aptitudes, et pour une fois qu’il voulut s’en mêler, il maria, comme on le sait, son maître, ou plutôt son ami, avec la fille d’un roi. Bien plus, il exécuta toute cette mission sans autres accessoires qu’un petit sac fermé par une coulisse, et une paire de bottes, et nous ne savons guère de ministres de France à l’étranger qui, pour arriver souvent à de plus minces résultats, se contenteraient d’un bagage si peu compliqué.

 

A la certitude avec laquelle le Chat combina, ourdit son plan et l’exécuta sans une faute de composition, on pourrait voir en lui un auteur dramatique de premier ordre, et il le serait sans doute s’il n’eût préféré à tout sa noble et chère paresse. Toutefois il adore le théâtre, et il se plaît infiniment dans les coulisses, où il retrouve quelques-uns de ses instincts chez les comédiennes, essentiellement Chattes de leur nature. Notamment à la Comédie-Française, où depuis Molière s’entassent, accumulés à toutes les époques, des mobiliers d’un prix inestimable, des dynasties de Chats, commencées en même temps que les premières collections, protègent ces meubles et les serges, les damas, les lampas antiques, les tapisseries, les verdures, qui sans eux seraient dévorés par d’innombrables légions de souris. Ces braves sociétaires de la Chatterie comique, héritiers légitimes et directs de ceux que caressaient les belles mains de mademoiselle de Brie et d’Armande Béjart, étranglent les souris, non pour les manger, car la Comédie-Française est trop riche pour nourrir ses Chats d’une manière si sauvage et si primitive, mais par amour pour les délicates sculptures et les somptueuses et amusantes étoffes. (A SUIVRE….)

 

THÉODORE DE BANVILLE.

 



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Texte relu par : A. Guézou
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Le Chat 5

Posté par othoharmonie le 20 novembre 2011

Par Théodore de Banville

Le Chat 5 dans CHAT chat2A la comédie sensée et raisonnable du justicier Molière, le Chat qui, ayant été dieu, sait le fond des choses, préfère encore celle qui se joue dans la maison de Guignol, comme étant plus initiale et absolue. Tandis que le guerrier, le conquérant, le héros-monstre, le meurtrier difforme et couvert d’or éclatant, vêtu d’un pourpoint taillé dans l’azur du ciel et dans la pourpre des aurores, l’homme, Polichinelle en un mot, se sert, comme Thésée ou Hercule, d’un bâton qui est une massue, boit le vin de la joie, savoure son triomphe, et se plonge avec ravissement dans les voluptés et dans les crimes, battant le commissaire, pendant le bourreau à sa propre potence, et tirant la queue écarlate du diable ; lui, le Chat, il est là, tranquillement assis, apaisé, calme, superbe, regardant ces turbulences avec l’indifférence d’un sage, et estimant qu’elles résument la vie avec une impartialité sereine.

Là, il est dans son élément, il approuve tout, tandis qu’à la Comédie-Française, il fait quelquefois de la critique, et de la meilleure. On se souvient que par amitié pour la grande Rachel, la plus spirituelle parmi les femmes et aussi parmi les hommes qui vécurent de l’esprit, la belle madame Delphine de Girardin aux cheveux d’or se laissa mordre par la muse tragique. Elle fit une tragédie, elle en fit deux, elle allait en faire d’autres ; nous allions perdre à la fois cette verve, cet esprit, ces vives historiettes, ces anecdotes sorties de la meilleure veine française, tout ce qui faisait la grâce, le charme, la séduction irrésistible de cette poétesse extra parisienne, et tout cela allait se noyer dans le vague océan des alexandrins récités par des acteurs affublés de barbes coupant la joue en deux, et tenues par des crochets qui reposent sur les oreilles.

Comme personne ne songeait à sauver l’illustre femme menacée d’une tragédite chronique, le Chat y songea pour tout le monde, et se décida à faire un grand coup d’État. Au premier acte de Judith, tragédie, et précisément au moment où l’on parlait de tigres, un des Chats de la Comédie-Française (je le vois encore, maigre, efflanqué, noir, terrible, charmant !) s’élança sur la scène sans y avoir été provoqué par l’avertisseur, bondit, passa comme une flèche, sauta d’un rocher de toile peinte à un autre rocher de toile peinte, et, dans sa course vertigineuse, emporta la tragédie épouvantée, rendant ainsi à l’improvisation éblouissante, à la verve heureuse, à l’inspiration quotidienne, à l’historiette de Tallemant des Réaux merveilleusement ressuscitée, une femme qui, lorsqu’elle parlait avec Méry, avec Théophile Gautier, avec Balzac, les faisait paraître des causeurs pâles. Ce n’est aucun d’eux qui la sauva du songe, du récit de Théramène, de toute la friperie classique et qui la remit dans son vrai chemin ; non, c’est le Chat !

220px-WhiteCat dans CHATD’ailleurs, entre lui et les poètes, c’est une amitié profonde, sérieuse, éternelle, et qui ne peut finir. La Fontaine, qui mieux que personne a connu l’animal appelé : homme, mais qui, n’en déplaise à Lamartine, connaissait aussi les autres animaux, a peint le Chat sous la figure d’un conquérant, d’un Attila, d’un Alexandre, ou aussi d’un vieux malin ayant plus d’un tour dans son sac ; mais, pour la Chatte, il s’est contenté de ce beau titre, qui est toute une phrase significative et décisive : La Chatte métamorphosée en femme ! En effet, la Chatte est toute la femme ; elle est courtisane, si vous voulez, paresseusement étendue sur les coussins et écoutant les propos d’amour ; elle est aussi mère de famille, élevant, soignant, pomponnant ses petits, de la manière la plus touchante leur apprenant à grimper aux arbres, et les défendant contre leur père, qui pour un peu les mangerait, car en ménage, les mâles sont tous les mêmes, imbéciles et féroces. Lorsqu’à Saint-Pétersbourg, les femmes, avec leur petit museau rosé et rougi passent en calèches, emmitouflées des plus riches et soyeuses fourrures, elles sont alors l’idéal même de la femme, parce qu’elles ressemblent parfaitement à des Chattes ; elles font ron-ron, miaulent gentiment, parfois même égratignent, et, comme les Chattes, écoutent longuement les plaintes d’amour tandis que la brise glacée caresse cruellement leurs folles lèvres de rose.

(A SUIVRE….) 

THÉODORE DE BANVILLE.

 



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Le Chat 6

Posté par othoharmonie le 20 novembre 2011

Par Théodore de Banville 

 

Le Chat 6 dans CHAT pt50166Le divin Théophile Gautier, qui en un livre impérissable nous a raconté l’histoire de ses Chats et de ses Chattes blanches et noires, avait une Chatte qui mangeait à table, et à qui l’on mettait son couvert. Ses Chats, très instruits comme lui, comprenaient le langage humain, et si l’on disait devant eux de mauvais vers, frémissaient comme un fer rouge plongé dans l’eau vive.

 

C’étaient eux qui faisaient attendre les visiteurs, leur montraient les sièges de damas pourpre, et les invitaient à regarder les tableaux pour prendre patience. Ne sachant pas aimer à demi, et respectant religieusement la liberté, Gautier leur livrait ses salons, son jardin, toute sa maison, et jusqu’à cette belle pièce meublée en chêne artistement sculpté, qui lui servait à la fois de chambre à coucher et de cabinet de travail. Mais Baudelaire, après les avoir chantés dans le sonnet sublime où il dit que l’Erèbe les eût pris pour ses coursiers si leur fierté pouvait être assouplie à un joug, Baudelaire les loge plus magnifiquement encore que ne le fait son ami, comme on peut le voir dans son LIIe poème, intitulé : Le Chat.

 

Dans ma cervelle se promène,
Ainsi qu’en son appartement,
Un beau Chat, fort, doux et charmant.
Quant il miaule, on l’entend à peine,
 
Tant son timbre est tendre et discret ;
Mais, que sa voix s’apaise ou gronde,
Elle est toujours nette et profonde.
C’est là son charme et son secret.
 
Cette voix qui perle et qui filtre
Dans mon fond le plus ténébreux,
Me remplit comme un vers nombreux
Et me réjouit comme un philtre. 

 

Loger dans la cervelle du poète de Spleen et idéal, certes ce n’est pas un honneur à dédaigner, et je me figure que le Chat devait avoir là une bien belle chambre, discrète, profonde, avec de moelleux divans, des ors brillants dans l’obscurité et de grandes fleurs étranges ; plus d’une femme sans doute y passa et voulut y demeurer ; mais elle était accaparée pour jamais par ces deux êtres familiers et divins : la Poésie et le chat, qui sont inséparables.

 

chatonlibre1 dans CHATEt le doux être pensif et mystérieux habite aussi dans la plus secrète solitude des cœurs féminins, jeunes et vieux. Dans l’École des Femmes de Molière, lorsqu’Arnolphe revient dans sa maison, s’informe de ce qui a pu se passer en son absence et demande anxieusement : « Quelle nouvelle ? » Agnès, la naïveté, l’innocence, l’âme en fleur, encore blanche comme un lys, ne trouve que ceci à lui répondre : « Le petit Chat est mort. » De tous les évènements qui se sont succédés autour d’elle, même lorsque le rusé Amour commence à tendre autour d’elle son filet aux invisibles mailles, elle n’a retenu que cette tragédie : la mort du petit Chat, auprès de laquelle tout le reste n’est rien. Et connaissez-vous un plus beau cri envolé que celui-ci : « C’est la mère Michel qui a perdu son Chat ! » Les autres vers de la chanson peuvent être absurdes, ils le sont et cela ne fait rien ; en ce premier vers sinistre et grandiose, le poète a tout dit, et il a montré la mère Michel désespérée, tordant ses bras, privée de celui qui dans sa vie absurde représentait la grâce, la caresse, la grandeur épique, l’idéal sans lequel ne peut vivre aucun être humain. Tout à l’heure elle était la compagne de la Rêverie, du Rythme visible, de la Pensée agile et mystique ; elle n’est plus à présent qu’une ruine en carton couleur d’amadou, cuisant sur un bleuissant feu de braise un miroton arrosé de ses larmes ridicules.

 

Le Chat peut être représenté dans son élégante réalité par un Oudry, ou de nos jours par un Lambert ; mais il partage avec l’homme seul le privilège d’affecter une forme qui peut être miraculeusement simplifiée et idéalisée par l’art, comme l’ont montré les antiques égyptiens et les ingénieux peintres japonais. Le Rendez-vous de Chats d’Edouard Manet, donné par Champfleury dans son livre, est un chef-d’œuvre qui fait rêver. Sur un toit éclairé par la lune, le Chat blanc aux oreilles dressées dessiné d’un trait initial, et le Chat noir rassemblé, attentif, aux moustaches hérissées, dont la queue relevée en S dessine dans l’air comme un audacieux paraphe, s’observent l’un l’autre, enveloppés dans la vaste solitude des cieux. A ce moment où dort l’homme fatigué et stupide, l’extase est à eux et l’espace infini ; ils ne peuvent plus être attristés par les innombrables lieux-communs que débite effrontément le roi de la création, ni par les pianos des amateurs pour lesquels ils éprouvent une horreur sacrée, puisqu’ils adorent la musique !

 

La couleur du poil, qui chez le Chat sauvage est toujours la même, varie à l’infini et offre toute sorte de nuances diverses chez le Chat domestique ; cela tient à ce que, comme nous, par l’éducation il devient coloriste et se fait alors l’artisan de sa propre beauté. Une autre différence plus grave, c’est que le Chat sauvage, ainsi que l’a observé Buffon, a les intestins d’un tiers moins larges que ceux du Chat civilisé ; cette simple remarque ne contient-elle pas en germe toute la Comédie de la Vie, et ne fait-elle pas deviner tout ce qu’il faut d’audace, d’obstination, de ruse à l’habitant des villes pour remplir ces terribles intestins qui lui ont été accordés avec une générosité si prodigue, sans les titres de rente qu’ils eussent rendus nécessaires ?  (FIN) .

 

 

THÉODORE DE BANVILLE.

 



Saisie du texte : S. Pestel pour la collection électronique de la Médiathèque André Malraux de Lisieux (30.I.2009)
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Le Peuple des Ours 1

Posté par othoharmonie le 20 novembre 2011


Bonjour nous sommes le peuple ours !  Nous sommes les êtres de la grande constellation « URSUS » et nous nous sommes incarnés sur terre il y a bien longtemps.  À l’origine, nous avions une apparence un peu différente de celle que nous avons actuellement (par exemple, notre nez était plus allongé et notre corps parfois plus gros que celui d’un Grizzly !) mais l’ours a toujours été reconnu à travers l’histoire.  Parfois jouant les bons, parfois jouant les méchants dans la grande mythologie humaine…  mais nous ne sommes ni l’un, ni l’autre ;  nous sommes.  Les cadeaux que nous apportons à l’humanité sont multiples mais nul n’est aussi important que notre capacité à dormir/rêver/méditer.
 
 Ursus arctos isabellinusN’est-ce pas étrange de parler de sommeil dans un monde aussi occupé, soit disant réveillé.  L’activité humaine sur la planète terre est tellement intense qu’elle produit un son tout à fait distinct.  C’est une sorte de vibration continue et plutôt sourde que nous reconnaissons de loin et la plupart d’entre-nous, à moins d’avoir bien faim, n’oserons pas s’en approcher !  Car voyez-vous, ce bruit nous rend agressifs et changent notre comportement normal.  Nous ne sommes pas naturellement agressifs.  Le manque de nourriture, le manque d’espace et la peur que nous ressentons lorsque nous entendons les sons disharmonieux, nous rends agressifs et à ce titre, les humains et les ours ont beaucoup en commun…

Pourquoi dormir, rêver, méditer.  À quoi cela peut-il bien servir dans un monde ou l’activité est considérée comme primordiale ?…   Cela est essentiel !!!  Et heureusement que nous sommes là pour maintenir cette énergie car vous faites erreurs si vous pensez que la vie est réelle.  C’est elle qui est un songe et votre vie est la résultante de ce que vous avez créé dans votre Esprit !   N’est-ce pas là toute une clé que nous vous donnons ?! 

 Ursus arctos syriacus, Parc zoologique de LunaretSi vous voulez transformer votre vie, vous devez d’abord la rêver car, ne vous y méprenez pas, tout est à créer.  La partie prédestinée de votre existence est plutôt mince comparée à tout ce qui vous revient de droit, à créer !  Dormez, dormez, dormez.  Créez, créez, créez.  Laissez-vous descendre dans votre inconscient, afin de maîtriser les forces de l’ombre et de la lumière, qui dansent dans vos vies.  Sans ces deux contrastes, vous ne pourriez exister dans votre forme actuelle mais pourtant, la véritable vie se situe entre ces deux polarités ! 

Mon confrère le lézard, est lui aussi un excellent rêveur.  Moi, je rêve pendant quelques mois et lui, il le fait à longueur de journée !  Je voudrais vous faire observer que plusieurs animaux sur cette terre, incarnent des forces, des énergies similaires mais le font dans des environnements différents.  Le lézard et moi ne partageons certes pas le même environnement et nos corps, nos véhicules, sont fait pour vivre à des endroits spécifiques. 

Play fight of polar bears edit 1.avi.OGGIl en est de même pour d’autres de mes frères animaux, tels le Condor et le rat musqué, qui diffusent un, sur terre l’autre, dans les airs, les qualités de vidangeur et transmuteur par excellence !  L’important, bien sûr, est de maintenir l’équilibre dans les diverses éléments terrestres.

Mais plusieurs diront comment pouvons nous rêver et créer?  Nous ne sommes pas conscients, lorsque nous dormons !  C’est là que nous, les ours, pouvons vous aider, si vous le désirez bien sûr.  Voici donc la clé du rêve éveillé : elle s’appelle la méditation. (à suivre…) 

 

Page d’origine : http://www.communication-animal.net

 

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Le Peuple des Ours 2

Posté par othoharmonie le 20 novembre 2011

Bonjour nous sommes le peuple ours ! (suite)

La méditation est un pont entre le monde du rêve et le monde de ce que vous appelez la réalité.    Lorsque l’hiver arrive, nous descendons dans un endroit noir et fermé, afin d’entrer en contact avec l’inconscient de notre mère terre et de méditer, afin de Ours brun, Parc animalier des Pyrénées, 2005créer une nouvelle réalité.  La saison hivernale est donc utilisée pour rétablir l’équilibre et guérir les blessures (multiples) subis par notre planète.  Nous ne dormons pas vraiment, nous voyageons sur une onde alpha qui permet à notre corps de survivre malgré l’absence de nourriture physique.  Notre nourriture, puisée dans la méditation, nous permet de faire notre travail spirituel avec un minimum de dommage sur notre corps physique !  Vos scientifiques en savent plus long sur nous qu’ils ne vous laissent penser.  Cela ne vous semble-t-il pas fascinant, que nous puissions vivre aussi longtemps sans manger ou boire ?…

À quoi rêvent les ours ?  Mais à l’été bien sûr !  Car l’été représente l’héritage naturel des êtres de cette planète.  C’est une saison de rivières fraîches, de fleurs odorantes, de gibiers, de plantes, de fruits délicieux et de jeux interminables.  C’est la saison de l’insouciance à nouveau retrouvée et c’est la saison des nouveau-nés.  Que d’abondance !   Nous les ours savons bien l’apprécier !  Notre gratitude s’inscrit dans tous nos gestes quotidiens, notre célébration de la vie qui, nous le savons bien, va s’éteindre dans les mois à venir.   Ne serait-ce pas une bonne idée pour vous aussi de vivre ainsi, plus en harmonie ?  Bien sûr, nous savons que votre rythme est différent du nôtre mais si nous pouvions nous permettre de vous suggérer, essayez tout de même de prendre plus de temps pour rêver/méditer et par la suite, jouir de votre travail spirituel !  Pour nous les ours, il est clair que nous créons l’été, par notre travail de transmutation hivernale. 

Peut-être pourriez-vous faire de même pour les problèmes qui vous accablent tant…

Lorsque nous voyons des humains approcher, nous somme toujours fascinés par la quantité de « formes pensées » d’inquiétudes et de peurs qui s’en émanent.  Chers humains, vous avez de toutes évidences perdus le contrôle de vos pensées qui tournent en orbite autours de votre corps physique !  Et n’allez pas vous imaginer que les pensées n’on pas d’effets, simplement parce que vous ne pouvez les voir.  Elles sont parfois comme les insectes qui vous poursuivent sans relâche…  D’ailleurs, plus vous avez des pensées de peurs, plus vous attirez des insectes à vous et plus vous en serez incommodés ! 

Les insectes sont ainsi le miroir de votre organe de pensée, totalement hors de contrôle et déstabilisée !  Nous vivons aussi avec beaucoup d’insectes mais notre relation à eux est bien différente et nous vous disons ceci : apprenez à maîtriser votre organe de pensée et le peuple des insectes diminuera considérablement !  Il ne restera que ce qui est nécessaire pour nourrir les êtres qui s’en nourrissent et qui sont destinés à rester sur cette planète. 

 Ursus arctos middendorffiVous savez, la relaxation est aussi une clef que nous désirons partagée…  Avez-vous déjà observé un Ours ?  Nous sommes des êtres puissants, rapides, souples, ludiques ; et nous sommes en perpétuel état de relaxation.  Cet état nous permet d’être très agile dans des corps assez volumineux.  La relaxation nous permet de faire tout ce que nous faisons avec plus de précision et moins d’effort.  Cet état serait définitivement un atout pour vous afin de faire face à vos multiples « soucis ».  La relaxation permet d’être dans le moment présent et de réagir adéquatement à tout ce qui se présente à vous.  Elle permet aussi aux inquiétudes de se transformer ;  elle crée l’espace nécessaire à la transformation.  Nous les ours sommes des êtres d’espaces et de silence.  C’est pourquoi nous souffrons beaucoup lorsque l’espace que nous occupons est menacée.  Notre besoin d’espace physique est le reflet de notre espace intérieur.  Nous sommes passés maître dans l’art du vide intérieur et c’est ce qui nous donne tant de facilité à « hiberner », comme vous dîtes.

Nous ne le dirons jamais assez : l’être humain doit apprendre à rêver sa vie avant d’essayer de la contrôler par des moyens extérieurs.   Toute création, donc toute vie, passe d’abord par l’intérieur avant de s’actualiser à l’extérieur.  Plus c’est confus, inconscient et chaotique en-dedans, plus l’extérieur reflètera cette état.  L’inverse est aussi vrai : plus vous créerez la joie, la paix et la vision consciente de ce que vous désirez en vous, plus votre monde se transformera, par moment, sous vos yeux. 

(à suivre.) 

 

Page d’origine : http://www.communication-animal.net

 

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