Eléphant 8
Posté par othoharmonie le 21 novembre 2011
Par Louis Figuier
Nous venons de dire que les Éléphants habitent les immenses plaines de l’Asie et de l’Afrique. C’est que deux espèces différentes doivent être distinguées dans la famille des Éléphants de la création actuelle : l’Éléphant d’Asie et celui d’Afrique.
L’Éléphant d’Asie vit aujourd’hui dans tout le continent des Indes, principalement dans le royaume de Siam, l’empire des Birmans, le Bengale et l’Indoustan proprement dit. On le trouve également dans l’île de Ceylan, à Sumatra et dans l’île de Bornéo. Sa tête est large, aplatie sur le devant du front, renflée sur ses côtés. Ses oreilles sont moins grandes que celles de l’Éléphant d’Afrique, et leurs proportions sont un peu différentes. Sa couleur est d’un gris terreux passant au brun.
Chez quelques individus, atteints d’une sorte d’albinisme, la couleur est d’un blanc rosé. Les peuples des bords du Gange croient que ces Éléphants blancs ou roses donnent asile aux âmes de leurs anciens rois. Les princes de Siam et du Pégu, fiers de les posséder, les logent dans leurs palais, et les font servir magnifiquement par un nombreux personnel d’adorateurs.
Les Éléphants blancs sont en grande vénération dans l’Inde. Imbus du dogme de la métempsycose, les Indous sont persuadés que, dans la nature, l’Éléphant tient après l’homme le premier rang ; et comme, d’un autre côté, la blancheur de la peau est à leurs yeux un symbole de la pureté de l’âme, une distinction que les dieux n’accordent qu’aux êtres parfaits, l’Éléphant blanc est pour les Indiens un animal privilégié, dont le corps ne peut servir d’habitation qu’aux mânes des rois, des pontifes et des héros.
Il n’y a aujourd’hui que les Éléphants d’Asie que l’on puisse réduire en domesticité. Il faut même remarquer que les individus que l’on utilise ne sont pas nés en captivité. Ce sont des individus capturés sauvages et ensuite apprivoisés.
La chasse aux Éléphants se fait, dans l’Inde, comme elle se faisait il y a deux mille ans ; car tous les Orientaux restent fidèles à leurs anciens usages.
On choisit une vaste étendue de bois, qu’on hérisse de barricades et qu’on entoure de fossés larges et profonds. On y introduit des femelles privées. C’est un appât auquel les Éléphants sauvages ne résistent jamais, surtout si l’on a eu soin de choisir la saison des amours. Ils arrivent par troupes dans la nuit, et vont trouver les femelles, en passant par de larges ouvertures qu’on a eu soin de ménager dans l’enceinte. On ferme ces issues aussitôt qu’il en est entré un nombre suffisant, et l’on introduit, pour les traquer et pour battre le bois, des chasseurs et des Éléphants privés.
On a eu soin de disposer à l’avance, dans l’intérieur de l’enceinte, de petits enclos à une seule entrée ; on cherche à faire engager dans ces petits enclos les Éléphants sauvages, pour les isoler. Dès que les Éléphants s’aperçoivent qu’ils sont renfermés, ils entrent en fureur, et font, pour recouvrer leur liberté, des efforts désespérés. On les laisse se débattre un certain temps, et lorsque la faim et la fatigue ont épuisé leurs forces, on les fait attaquer par des Éléphants privés, qui les terrassent à coups de trompe et les forcent à se tenir tranquilles. Les chasseurs saisissent ce moment pour leur jeter des noeuds coulants, et pour les attacher aux arbres, où ils les laissent jusqu’à ce que, domptés par le jeûne et par la lassitude, ils n’opposent plus de résistance. Alors on les mêle aux Éléphants privés, et on achève de les rendre dociles par des caresses et par des soins. (A SUIVRE…)
FIGUIER, Louis (1819-1894) : L’Éléphant (1882).
Saisie du texte : S. Pestel pour la collection électronique de la Médiathèque André Malraux de Lisieux (05.II.2009) Texte relu par : A. Guézou
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Diffusion libre et gratuite (freeware)
Texte établi sur un exemplaire (BmLx : nc) de l’ouvrage Les Animaux chez eux illustré par Auguste Lançon (1836-1887) paru chez L. Baschet à Paris en 1882.
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