Diabolisation de l’Ours
Posté par othoharmonie le 13 novembre 2011
Selon Michel Pastoureau, de nombreux théologiens s’inspirèrent de saint Augustin et de Pline l’Ancien pour dresser un portrait diabolique de l’ours et le dévaloriser. Ainsi associé au diable, l’ours devint son animal favori ou l’une de ses formes. Dans l’iconographie chrétienne, le diable possède souvent les pieds, le mufle et le pelage d’un ours, et prend la forme de l’animal dans les rêves des saints, des rois et des moines. L’apparence velue de l’ours et sa couleur brune devinrent un signe de bestialité diabolique, l’animal se vit chargé de péchés capitaux tels que la tromperie, la luxure, la goinfrerie, la colère, l’envie et la paresse. D’autres études arrivent à la même conclusion, il s’agissait d’une façon de mettre un terme aux survivances du culte de l’ours en Europe, tout comme la généralisation des montreurs d’ours, l’interdiction des « jeux » et l’hagiographie contribuèrent à y mettre fin.
Les légendes se firent l’écho de cette représentation. La malebeste de Vendée était réputée dévorer les troupeaux, toutes les jeunes filles du bourg d’Angles finirent sous ses crocs et seul un homme d’Église parvint à la vaincre grâce à sa foi.
Christianisation des peuples germains et scandinaves
Ce sont principalement des clercs et des prélats qui, dès l’époque de Charlemagne, luttèrent impitoyablement contre les traditions du paganisme germanique et scandinave afin de convertir ces peuples au christianisme. Michel Pastoureau évoque l’effroi qu’ont dû inspirer les légendes sur la proximité entre l’ours et l’homme comme justification à cette lutte et Régis Boyer la peur des pratiques visant à s’approprier la force de l’animal. Les traditions liées à l’ours ont perduré jusqu’aux environs de l’an mille, période à laquelle l’ensemble des peuples qui pratiquaient le paganisme nordique furent christianisés.
Preuve de cette proximité, une légende saxonne rapportée par Guillaume d’Auvergne parle d’un ours d’une force prodigieuse qui enleva la femme d’un chevalier et l’amena jusqu’à la caverne où il hivernait chaque année. Il la viola pendant plusieurs années et trois enfants naquirent, jusqu’au jour où la femme fut délivrée par des charbonniers, retrouva son mari et éleva ses enfants qui devinrent tous trois chevaliers, mais se distinguaient par une pilosité abondante et l’habitude d’incliner la tête sur la gauche, comme les ours. Ils furent nommés Ursini, les fils de l’ours. Il s’agit d’un thème symbolique que l’on retrouve très fréquemment dans d’autres cultures et à toutes les époques.
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