Vénération de l’Eléphant
Posté par othoharmonie le 22 octobre 2011
On raconte qu’à l’origine des temps, les éléphants étaient pourvus d’ailes. Chargeant le ciel de leurs amples masses grises, ils erraient au gré des vents et des ascendances, libres des chemins de la terre. Leur poids – leur poids de chair ou peut-être celui d’une faute commise – ne pouvait que les ramener parmi les êtres ordinaires. Pleins des gouttes purificatrices, chargés d’eaux du ciel bénéfiques aux cultures des hommes, ils descendirent, acceptèrent de servir… Depuis lors, au rythme du lent balancement de leurs hanches, au pas de leurs pieds aussi légers que des ombres, ils parcourent les sentes et les routes dont ils ne redoutent ni boue ni poussière. Car les éléphants, sachez-le, sont des nuages.
En Asie, l’éléphant est respecté, dressé pour le travail et utilisé comme monture royale. Il est vénéré par les Hindouistes comme par les Bouddhistes.
L’exemple du Laos
La symbolique de l’éléphant chez les Laotiens s’est construite en quatre phases s’étendant des débuts de leur histoire culturelle au VIIe siècle de notre ère.
Aux origines : l’éléphant est perçu comme un esprit de la forêt, féroce et puissant… Dans la première phase où l’humanité est constituée de petits groupes familiaux vivant disséminés dans une forêt hostile, sans établissements fixes, l’éléphant devait impressionner par sa masse, sa force sauvage et sa longévité mais également par certaines de ses caractéristiques étonnamment proches de celles de l’homme : son intelligence, son affectivité et son organisation sociale. L’éléphant est alors craint comme un fauve. Mais peut être lui reconnaît-on déjà des particularités qui font de lui l’incarnation d’un puissant esprit de la forêt. Au néolithique : l’éléphant domestiqué devient l’allié de l’homme La deuxième phase se situe au néolithique, période de grandes innovations techniques. L’agriculture apparaît vers le VIe millénaire avant notre ère. La domestication de l’éléphant, se situe également à cette époque. Si l’éléphant est considéré comme symbole de force et longévité, il est aussi plus pragmatiquement apprécié pour ses capacités physiques en matière de transports, de traction des matériaux et pour son aide aux champs qu’il piétinait en guise de labourage.
La domestication de l’éléphant avait en outre révélé sa faculté d’exécuter des ordres comportant plusieurs actions enchaînées, ce qui ne pouvait que renforcer l’idée d’une identité de nature entre l’homme et l’éléphant. Au fil des siècles, les hardes d’éléphants sauvages, qui constituèrent longtemps une terrible menace pour les colonies humaines, furent soit domestiquées soit refoulées dans les régions montagneuses. Employés dès lors comme bêtes de somme, ou dans les armées, les éléphants cessèrent, tout naturellement, d’être considérés comme malfaisants. Le pachyderme devint même l’animal bénéfique par excellence, un animal face à qui rien, ni personne, ne résiste. Le plus sûr et le plus puissant allié de l’homme, en somme.
L’influence indienne et la sacralisation de l’éléphant La troisième phase, marquée par l’influence brahmanique, peut être datée du milieu du VIIe siècle de notre ère. Elle est le résultat d’une expansion septentrionale khmère, à partir du site pré-angkorien de Vat Phou, via la vallée du Mékong, jusqu’aux frontières du Yunnan. Cette expansion introduisit dans la région la vision indienne de l’éléphant, qui co-exista avec celle des Laotiens de l’époque et la compléta. Dès lors, au-delà de sa force et de sa longévité, l’éléphant devient le symbole de la fertilité.
Il est surnommé le « cousin des nuages ». Est-ce à cause de sa couleur grise ? De sa morphologie rondelette ? Ou de sa passion pour l’eau ? Cet attribut de fertilité vient donc se superposer aux croyances plus anciennes. La vision indienne de l’éléphant apporte cependant d’autres éléments. En tant que divinité gardienne des quatre orients (lokapala), l’éléphant revêt également, outre un caractère sacré, celui de protecteur, de défenseur.
Le terme « million d’éléphants », qui qualifiait le royaume du Laos, désignerait donc le million de pachydermes affectés au soutien du pays. Indra, le chef des divinités célestes est monté sur le plus prestigieux d’entre eux, Erawan, l’éléphant blanc tricéphale. C’est sous cette figure emblématique que les souverains brahmaniques des pays d’Asie du Sud-Est se sont représentés
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